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Patrimoine

Les larmes de Giotto

Le célèbre cycle pictural de la chapelle des Scrovegni, à Padoue, vient d’être restauré. Les mesures prises devraient permettre d’éviter une ultérieure dégradation des fresques.


Chapelle des Scrovegni, Padoue,
Lamentations sur le corps du
Christ
Le cycle sur l’Histoire de Jésus et de Marie et le Jugement Dernier couvre 900 mètres carrés. Giotto et ses assistants l’ont peint en 850 «journées», entre 1303 et 1305. Dans la technique de la fresque, la peinture doit être appliquée immédiatement sur l’enduit humide pour qu’elle puisse s’imprimer. Une «journée» constitue l’ensemble de cette procédure, de la mise en place de l’enduit à la peinture. Les peintres de l’époque pouvaient réaliser plusieurs «journées» dans un espace de vingt-quatre heures. Ils mettaient ainsi beaucoup moins de temps à peindre que nous n’en mettons aujourd’hui à restaurer…


Chapelle des Scrovegni, Padoue,
Les Noces de Cana
«La restauration a commencé en juillet 2001 et a donc duré un peu plus de huit mois. Mais elle a été précédé de quinze années d’étude !» souligne Davide Banzato, le directeur des musées de Padoue. Les causes de la dégradation sont l’humidité propagée par la respiration des visiteurs et la pollution. Nous avons condamné l’entrée principale, qui donnait sur une rue fréquentée et qui constituait la principal source de gaz carbonique. Nous avons installé un système de suivi de la qualité de l’air et l’afflux des visiteurs sera contrôlé. On ne pourra accéder à la chapelle qu’après réservation, par petits groupes de vingt-cinq personnes au maximum, tous les quarts d’heure, après être passé par un sas. Dans les périodes de grande affluence, nous arriverons comme aujourd’hui à une fréquentation de mille visiteurs par jour mais elle sera mieux répartie.»


L'équipe de restaurateurs au travail
Une restauration avait déjà été effectuée dans les années soixante sous la direction de l’équipe Tintori. L’actuelle campagne a eu pour objet d’enlever les particules de poussière qui s’étaient déposées à la surface. «Cela a permis de redécouvrir les couleurs claires et brillantes de Giotto. Et de faire apparaître certains détails depuis longtemps disparus, comme les larmes des femmes qui pleurent le Christ mort…» La restauration, dirigée par Basile, de l’Istituto Centrale del Restauro, a coûté 1,9 millions d’euros. Elle a été présentée comme «douce». Mais elle s’est tout de même attirée les foudres d’ArtWatch, un mouvement dirigé par le professeur James Beck, de l'université de Columbia, qui estime que l’on n’a pas traité le problème essentiel : l’humidité causée par l’existence d’une rivière souterraine, qui déborde parfois pour envahir la crypte de l’église.


 Rafael Pic
19.03.2002