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Patrimoine

L’Assemblée nationale salue l'irrévérence

Avec la sculpture Daumier créant Ratapoil de Tim, ce sont deux caricaturistes qui élisent domicile au Palais Bourbon.


Tim, Daumier créant Ratapoil
© Assemblée nationale
Quel contraste entre les lenteurs d’une inauguration dans la fastueuse Galerie des fêtes de l’Hôtel de Lassay et la sculpture qui avait réuni ce très officiel parterre… Mais il est sans doute à la hauteur de l’audace que constitue l’installation de cette œuvre au sein de l’Assemblée nationale. C’est en effet un monument à la gloire de deux caricaturistes qui a rejoint hier la rotonde du Palais-Bourbon, au pied d’un escalier que le maître français du genre, Daumier, et l’un de ses plus célèbres héritiers, Tim, ont en leur temps emprunté pour venir croquer des scènes de la vie politique. Cent soixante dix ans après l'incarcération de Daumier, condamné pour avoir fait de Louis-Philippe un Gargantua avalant de l’argent et excrétant des décorations, comment interpréter cette « sanctification » de l’art de la charge ? Raymond Forni, le président de l’Assemblée nationale, a tenu à souligner que cette œuvre, «symbole de l’art et du génie au service de l’idéal républicain» rendait hommage à l’indépendance d’esprit et aux règles du jeu démocratique et qu’elle devrait constituer, pour les élus, une incitation à la modestie face aux critiques publiques.

Comme ont tenu à le souligner les personnes présentes lors de la cérémonie, la réalisation de cette œuvre était très chère à l’artiste français d’origine polonaise, Louis Mitelberg, dit Tim. Décédé le 7 janvier dernier à l’âge de 83 ans, il y a consacré ses dernières forces. Ce bronze représente Daumier dans l’exercice de son art, en train de créer la silhouette aiguë de son plus célèbre personnage, Ratapoil. Il a été commandé en 2001 par l’Association des amis d’Honoré Daumier. Offert à l’Assemblée par l’association qui a reçu le soutien financier du ministère de la Culture, il aura donc eu plus de succès que les précédentes œuvres de Tim. L’hostilité des milieux militaires avait en effet empêché la très symbolique installation de son Hommage au Capitaine Dreyfus aux Invalides, sur les lieux même de la dégradation publique du capitaine. Et monument avait été longtemps relégué dans une clairière du jardin des Tuileries avant d’être inauguré au coin de la rue Notre-Dame-des-Champs et du boulevard Raspail.


 Zoé Blumenfeld
25.01.2002