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Musées

Musée juif de Berlin. Architecte, Daniel Libeskind, Berlin
© Photo: Ruhrgaz AG


Menashe Kadishman, Feuilles tombées (Shalechet), 2001
© Photo: Jens Ziehe


Le Musée juif de Berlin a enfin sa collection

Après deux années de préparation, le Musée juif de Berlin ouvre enfin les portes de ses collections permanentes.

Depuis janvier 1999, le bâtiment conçu par Daniel Libeskind a attiré environ 350.000 visiteurs. On en viendrait presque à oublier que jusqu’ici, le Musée juif de Berlin ne présentait pas de collection. C’est chose faite depuis aujourd’hui. Après quelques privilégiés triés sur le volet et invités aux deux journées d’inauguration, le public peut enfin découvrir une exposition qui dresse en 3000m2 et 3900 objets une histoire des juifs d’Allemagne depuis l’époque romaine. Comme l’explique le directeur du musée, W. Michael Blumenthal, c’est un pari osé. Tout ne peut pas être montré et les partis pris ne satisferont sans doute pas tout le monde. Une manière de se prémunir des critiques qui devraient être constructives dans la mesure où l’équipe se refuse à parler d’exposition permanente. Le néo-zélandais Ken Gorbey, directeur de projet, souligne, « l’exposition qui ouvre au mois de septembre ne doit pas être vue comme un état définitif. Elle est plutôt la première version d’une exposition en constante évolution qui veut faire évoluer la recherche et se faire l'écho des débats contemporains sur l’histoire juive allemande. ».

Quoiqu’il en soit, l’heure n’est pas encore aux critiques et l’originalité du projet muséographique de Gorbey mérite d’être soulignée. Plus qu’une visite linéaire, il propose de multiples parcours combinant documents historiques, œuvres d’art, objets de la vie quotidienne et stations multimédias. Au détour d’une salle, on découvre ainsi une copie du décret de 321 dans lequel Constantin autorise la nomination de juifs à la curie de Cologne, un autoportrait du peintre berlinois Max Liebermann, un nécessaire de circoncision ou l’installation de l’israëlien Kadishman Feuilles tombées, soit 10.000 visages aux bouches béantes grossièrement découpés dans des plaques de fer et incrustés au sol comme une réminiscence des victimes innocentes. Autre choix intéressant qui distingue le musée berlinois de son « équivalent » parisien, une présentation alternant vision globale d’une période et biographies de personnalités plus ou moins connues. C’est ainsi que le 17e siècle se trouve incarné par Glickl, une femme d’affaires juive, ou que le philosophe Moses Mendelssohn illustre le siècle des Lumières. Autant de choix muséographiques qui se trouvent enrichis par les créations des designers munichois Winderoll et Würth, récemment mis à l'honneur pour leur travail à la Maison de l'histoire de Bonn.


 Zoé Blumenfeld
13.09.2001