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Expositions

La chute de la maison Condé

Le musée de Chantilly dresse la biographie d'un homme passionné, le duc d' Enghien, mort sous les balles de Napoléon.


Gabriel de Saint-Aubin, Louise-
Marie-Bathilde d'Orléans,
duchesse de Bourbon, avec son
fils Louis-Antoine-Henri de
Bourbon
© RMN / R.G.Ojeda
Propriété de la famille Condé du 16e siècle jusqu’en 1830, le château de Chantilly était certainement le lieu idéal pour présenter les souvenirs du prince et évoquer son histoire. De sa naissance à Chantilly (1772) au peloton d’exécution (1804), 90 œuvres et documents d’archives retracent la destinée du dernier des Condés. La variété des pièces présentées fait toute l’originalité de l’exposition : portraits, documents d’archives, miniatures, plans, armes et maquettes de monuments. « Le duc a vécu une enfance heureuse entre Chantilly et le palais Bourbon, certainement la plus belle période de sa vie. Le Journal des chasses, tenu par le capitaine de chasse Toudouze, relate non seulement le nombre d’animaux tués mais aussi les fêtes et autres amusements du jeune homme. Sa première partie de jeu de paume y est mentionnée » précise Nicole Garnier, commissaire de l’exposition. Dès l’âge de 6 ans, l’abbé Millot prend en charge son éducation. Son enseignement basé sur des questions-réponses est illustré par les cahiers d’écolier du duc. On apprend ainsi que du haut de ses sept ans, le duc possédait déjà la connaissance du latin. Pastels et miniatures s’attachent à représenter des scènes intimes comme les ribambelles confectionnées avec sa mère, la princesse Bathilde.


Jeanne-Louise dite Nanine Vallain
(1767-1815), Portrait du duc
d'Enghien
© RMN/R.G.Ojeda
Le journal du duc d’Enghien, tenu de 1789 à 1795, nous renseigne sur les décisions du prince de partir « chercher des remèdes aux maux de la France » après la prise de la Bastille par les révolutionnaires. La cour se réfugie sur les bords du Rhin dès 1791 tandis que l’armée de Condé se met en place. Toujours premier au combat, le « Duc-va-de-bon cœur » dirige ses 5000 hommes jusqu’en 1793, date à laquelle il reçoit un coup de sabre à la main. Le brassard blanc à fleur de lys noir , pareil à celui porté par le duc ce jour-là, illustre cet épisode au même titre que le drapeau présentant des traces de balles. Les récits du duc concernant la défense du village de Berstheim sont complètés par des plans des combats et des sabres d'artillerie.

De 1801 à 1804, le duc d’Enghien réside à Ettenheim, en Allemagne, auprès de son épouse, la princesse Charlotte mais se lasse vite de son inactivité. À la paix d’Amiens, signée en 1802, succède la guerre de la France contre l’Angleterre. Accusé de complot contre Bonaparte, le duc est arrêté dans la nuit du 14 au 15 mars 1804 et transporté au fort de Vincennes. Deux feuillets du Jugement rendu le 30 Ventôse de l’an XII traduisent une condamnation à mort unanime et pourtant sans preuve de culpabilité. La toile de Jean-Paul Laurens, L’exécution du duc d’Enghien dans les fossés de Vincennes immortalise la chute du dernier des Condés.

Il faut attendre la Restauration et Louis XVI pour qu’un hommage lui soit rendu. Une Vue du château de Vincennes au moment de l’exhumation du corps du duc d’Enghien par Jacques-Ignace Hittorf illustre le transport du corps dans la chapelle de Vincennes. Un monument à sa mémoire est commandé à Louis-Pierre Deseine. L’œuvre est interrompue par la mort de l’artiste en 1822. « L’exposition a permis de retrouver la version en marbre du buste du duc au château de Sychrov en Tchécoslovaquie, résidence de la princesse Charlotte». À quelques jours de l’ouverture de l’exposition, un particulier est venu présenter une bague en or tissée des cheveux du duc. « Ce cadeau avait été offert, après la mort du duc, à l’un de ses serviteurs dévoués». Cette relique complète le médaillon contenant une mèche de cheveux et le ducat retrouvé sur lui à sa mort.


 Stéphanie Magalhaes
04.02.2002