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Fnac au masculin

Un catalogue rassemblant un choix de 200 œuvres du Fonds national d’art contemporain prolonge la récente exposition du musée de Grenoble.

Dans une volonté de mise en visibilité de son action, le Fnac, qui ne possède aucun espace d’exposition en propre, a présenté récemment au musée de Grenoble une partie des œuvres acquises ces quinze dernières années. Cette initiative a des précédents : au cours des années 1990, trois expositions, à La Défense, au Magasin de Grenoble et à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-Arts, ont rendu compte auprès du public de la politique menée par l’institution. L’histoire du Fnac est synthétisée par Ann Hindry : créé dans sa forme actuelle, au début des années 1980, il est en fait l’héritier du «Dépôt de l’Etat», institution qui date de la Révolution française. Cet ancêtre était investi de la double mission d’achat aux jeunes artistes et de soutien financier aux artistes en difficulté. L'évolution vers le Fnac actuel se fait en plusieurs étapes.

L'après-guerre constitue un tournant décisif, avec l’ouverture des inspecteurs et de la commission d’achats des œuvres à la création contemporaine, en dehors du circuit fermé des salons officiels. Les personnalités de Jean Cassou, Jean Zay, Georges Huisman et Georges Salles ont été déterminantes pour la collaboration entre l’Etat et les gens de musées. André Malraux, nommé ministre de la Culture en 1959, confirme ce soutien à la scène contemporaine. En 1961, est fondé le Service de la création artistique, dirigé par Bernard Anthonioz. Il est chargé d’harmoniser les services d’aide à la production artistique. Six ans plus tard, le même Malraux, aidé de Gaëtan Picon, crée le Centre national d’art contemporain, initiateur d’expositions et d’échanges européens. En 1976, le Fnac voit sa mission confirmée, mais ce n’est qu’en 1981, avec la nomination de Jack Lang au ministère de la Culture, que des moyens conséquents lui sont alloués. En trois ans, le budget d’acquisitions triple. Ann Hindry ne s’interdit pas de poser ici les questions qui s’imposent après vingt ans de fonctionnement. A l’origine, l’institution n’avait pas pour but la constitution d’une collection. La visée était autre : il s’agissait d’acquérir des œuvres sans fil conducteur entre elles. Il semble qu’aujourd’hui la politique soit différente. Si le suivi des jeunes artistes demeure d’actualité, la constitution d’ensembles possédant une cohérence historique et de corpus d’artistes importants sont devenues des priorités. La définition du Fnac s’achemine donc de plus en plus vers celle de la collection.

Depuis 1985, 12 500 œuvres ont été acquises, dont seulement 200 ont été ici retenues. Dans un classement alphabétique, chacune se voit consacrer une page. Etant donné la pluralité de la mission qui a été confiée au Fnac, tous les domaines de la création artistique contemporaine trouvent ici leur place, du design à la photographie en passant par ce que l’on nomme «les arts plastiques» et la mode. La sélection rend compte du principe de répartition des acquisitions, qui sont pour moitié destinées aux artistes vivant en France et, pour l’autre, à ceux vivant à l’étranger. Chaque œuvre est accompagnée d’un court texte, souvent écrit par des inspecteurs à la création, suivant leur spécialité. Efficaces, ils replacent l’œuvre dans la carrière de l’artiste et en analysent la pertinence ainsi que la portée historique et esthétique. Au-delà du bilan de l’activité du Fnac, cet ouvrage nous livre, sur le mode de la compilation, un panorama certes partiel mais néanmoins significatif de la scène artistique contemporaine.


 Raphaëlle Stopin
16.05.2002