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Drouot : Pierre Bergé fera cavalier seul

L’homme d’affaires a retiré hier son offre pour le rachat de Drouot SA. Il a annoncé la création de sa propre maison de ventes.

Habitué à mener ses affaires tambour battant, Pierre Bergé semble s’être mal accommodé des hésitations des commissaires-priseurs parisiens. Sa proposition de rachat de la majorité des parts de Drouot SA n’ayant pas obtenu l’assentiment de la majorité des études, il l’a retirée hier en milieu de journée. Ceux-ci ont désormais face à eux la seule offre du groupe Barclays… même si d’autres sont attendues. Pour maître Studer, «il n’y a pas le feu. Nous avons pris la banque Lazard pour inventorier ce que nous possédons. De toute façon, ce n’est pas en période électorale que ces affaires doivent se régler. Il est urgent de réfléchir. Une position partagée par certains de ses confrères comme Rémi Ader : «Pierre Bergé a dit : “Je veux acheter Drouot SA” et s’était donné une date fixe. Mais, aujourd’hui, nous ne sommes pas vendeurs ! Il s’agissait d’une unsolicited offer comme l’on dit en anglais. Nos conseils nous ont dit : quelqu'un vous propose d'acheter ? Etudiez d'abord toutes les offres !»

D’autres commissaires-priseurs regrettent l’abandon du projet Bergé, comme maître Renaud : «A priori, j'étais favorable à son offre. Il est important qu'un homme s'investisse, qu'il y ait un maître à bord. Et les commissaires-priseurs n'accepteront pas que ce soit l'un d'eux qui occupent ce poste.» Maître Chayette, ancien président de Drouot SA, a des mots plus durs. Je déplore que l’opération Bergé n’aboutisse pas. Je suis convaincu qu’il aurait été un porte-drapeau très positif. Les actuels responsables de la profession endossent une terrible responsabilité. Je trouve extravagant que l’on se soit décidé à étudier sérieusement l’offre de Pierre Bergé il y a quelques jours, en appelant la banque Lazard et le cabinet Bredin-Prat, alors qu’on la connaissait depuis le mois de septembre ! Lorsque j’étais président de Drouot SA, j’avais commencé une estimation des actifs. J’étais favorable à la constitution d’un noyau dur, par un pacte d’actionnaires, pour que l’on puisse parler d’une même voix. Quand le président de la Compagnie déclare que son souci est d’être neutre, je ne suis pas d’accord. Ce qu’on lui demande, c’est une stratégie.»

«Des offres de prix qui ne m’apparaissent pas réalistes, et qui concernent le rachat des actions de Drouot Holding, ont déstabilisé la profession, explique Pierre Bergé. Je me refuse dès lors à me laisser entraîner dans une surenchère». Cette surenchère, selon le dirigeant de Yves Saint Laurent Couture, aurait pour seule conséquence d’amener à une vente par appartements de Drouot et de ses filiales, notamment la Gazette, qui suscite beaucoup d’appétits. Pierre Bergé conclut son communiqué en annonçant la création de sa propre maison de ventes «autour d’un certain nombre de commissaires-priseurs et d’experts». Qui seront-ils ? Les paris sont ouverts même si l’on peut supposer que des études comme Chayette-Cheval ou Buffetaud-Laurin-Guilloux étudieront avec intérêt la nouvelle forme de collaboration proposée.


 Rafael Pic
06.02.2002