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Stéphane Jacob

Stéphane Jacob : «L'art australien présente mille et une facettes»

Le spécialiste parisien a choisi une façon originale de présenter l'art de la Grande Ile : en appartement.

Etes-vous australien ?
Stéphane Jacob.
Non, je ne suis pas australien ! J’ai étudié l’histoire de l’art à l’Ecole du Louvre puis j’ai assuré, pendant trois ans, à Paris, les relations de presse du musée des Monuments français. Je suis ensuite parti vivre en Australie. J’y ai cherché du travail dans un musée, sans succès. La période ne s’y prêtait pas : c’était l’époque des essais nucléaires français ! J’ai voulu rapprocher l'art australien du marché français. Par art australien, j'entends aussi bien l'art aborigène que l'art dit occidental, parfois très international, des descendants d'Anglo-Saxons, d'Italiens, de Grecs…


Jack Kala Kala, Requin balangu
chassant la raie
, 1985, pigments
naturels sur écorce, env. 70 x 135 cm
Quand vous êtes-vous «installé»?
Stéphane Jacob.
J’ai créé ma structure en septembre 1996. Dans un premier temps, je pensais m’installer en galerie. Je me suis rendu compte que ce n’était peut-être pas un choix judicieux, l’art australien étant méconnu. J’ai donc mis au point mes soirées en appartement. Chaque semaine, je reçois des groupes de huit ou dix personnes. Je les installe sur le sofa, leur sers un petit verre de vin australien puis leur présente, une par une, devant la cheminée, des œuvres que je vais chercher dans les réserves. Il y a là des journalistes, des collectionneurs, des étudiants. Il est important pour moi que les gens ne se sentent pas contraints d’acheter. Je mène parallèlement des opérations grand public : cela va du commissariat d’expositions à la galerie Baudoin-Lebon et au musée de Clermont-Ferrand jusqu’à la présentation d’art australien dans les vitrines des Galeries Lafayette à l’occasion des Jeux Olympiques de Sydney.

Qu’est-ce que l’art australien ?
Stéphane Jacob.
On en connaît essentiellement le pointillisme de l’art aborigène, sur toile, écorce ou en sculpture. Dans l’esprit des gens, il s’agit d’art tribal. Pour moi, c’est de l’art contemporain à part entière. Certains de ses exposants sont désormais très connus comme Emily Kame Kagwarreye, qui a exposé à la Biennale de Venise. Mais je veux montrer que l’art australien ne se limite pas à l’art aborigène, qu’il a de multiples facettes et que l’art dit occidental, même le plus international, en fait partie : je pense aux photos de Tracey Moffatt, ou à Anne Thomson qui a participé à l’Exposition universelle de Séville en 1992. Il n’y a pas dans l’art australien cette dichotomie que l’on trouve chez nous entre arts majeurs (peinture, sculpture, installations) et arts mineurs (tapisserie, verre, etc). En Australie, on se dit d’ailleurs «artiste» avant de se dire «peintre» ou «sculpteur».


Dean Bowen, The big little man,
1999, bronze (édition 1/3),
215 x 198 x 54 cm
© ADAGP
De quand date sa reconnaissance ?
Stéphane Jacob.
Cela fait quelques années que l’art australien bénéficie d’une reconnaissance grandissante. Y ont eu leur part des expositions comme «Les magiciens de la Terre» à Beaubourg, fort décriée à l’époque, ou «Dreamings» à New York. Depuis une dizaine d’années, l’Australie a un pavillon à la Biennale de Venise et les Jeux Olympiques de 2000 ont bien sûr joué un rôle important. Le fait que l’Australie soit le pays d’honneur du salon Arco de Madrid, qui ouvre dans quelques jours, traduit cet état de fait.

Qui sont les collectionneurs ?
Stéphane Jacob.
Je propose des œuvres à tous les prix. Cela part de 80 euros pour les photographies et peut dépasser le million de francs. Pour l’exposition «Les Champs de la sculpture», j’ai fait fondre à la fonderie de Coubertin la sculpture monumentale (huit mètres de haut) de John Kelly, qui représente une vache dans un arbre. Elle a ensuite été acquise par un collectionneur de Melbourne pour 2,5 millions de francs. Dans ma clientèle, je remarque beaucoup de professions libérales, de capitaines d’industrie. Mais il y a encore trop peu d’intérêt de la part des collections d’entreprise.


 Rafael Pic
12.02.2002