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Expositions

Robert Jacobsen, Le Corbusier, 1950, fer noir, Birger Raben-Skov
© Photo: Jakob Skou-Hansen og Riccardo Buccarella


Denise René et (de gauche à droite) Dewasne, Vasarely, Jacobsen, un inconnu, Deyrolles, 1949
© Statens Museum for Kunst


Robert Jacobsen, un Danois à Paris

Dans les années 1950, celui qui combinait les formes géométriques de fer brut s’est imposé à Paris comme l’une des figures majeures de la scène constructiviste.

Robert Jacobsen (1912-1993) a trente-cinq ans lorsqu’il arrive à Paris, accompagné de son épouse et de son ami Richard Mortensen. C’est un voyage capital. Traverser en train une Allemagne affamée et ruinée renforce les convictions politiques de l’homme et accentue la volonté de l’artiste de contribuer par ses œuvres à bâtir une nouvelle société. Cette ambition, il la partage avec ceux qu’il va côtoyer dans le cercle de Denise René auprès de laquelle il est introduit : Vasarely, Poliakoff, Pevsner ou Magnelli. Comme eux, il part de formes géométriques pour établir un mode d’expression artistique neuf qui réponde aux exigences de simplicité, d’harmonie et d’équilibre de cette nouvelle société.

Pour le sculpteur, les résultats de cette recherche formelle ne se laissent pas attendre. Alors qu’en 1937, il créait des sculptures d’animaux fantastiques en granit, Jacobsen change d’orientation. Il adopte un nouveau matériau qu’il ne cessera d’utiliser jusqu’à la fin de sa vie, « le fer brut, directement sorti de l’usine ». Il abandonne la figuration même stylisée pour un travail constructiviste d’agencement de courbes et de droites. Mais sa rupture la plus fondamentale avec la tradition n’est pas là. Ce qui fait l’originalité et le succès de Jacobsen, c’est son exploration avant-gardiste du vide, très éloignée des préoccupations de masse ou de volume. Ses sculptures engendrent leurs propres espaces en étant évidées en leur cœur.

En réunissant 50 sculptures, cette rétrospective permet de mieux comprendre les préoccupations formelles qui sous-tendent les expérimentations de Jacobsen entre 1947 et 1959. Elle illustre son passage du fer noir au métal polychrome ou oxydé, l’évolution de la forme simple et rigoureuse vers des compositions plus complexes et massives. Des documents légués par l’artiste au Statens Museum for Kunst, dessins, photographies et magazines enrichissent cette présentation. Ils témoignent des relations que Jacobsen entretenait avec les avant-gardes parisiennes mais aussi d’aspects plus originaux. Ainsi, les commissaires de l’exposition font la part belle à sa passion pour le jazz. Des musiques chères à l’artiste animent la présentation et accentuent la sensation rythmique déjà inhérente aux sculptures.


 Zoé Blumenfeld
17.09.2001