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Expositions

Petite histoire de la vidéo

Michel Nuridsany propose au Fresnoy une exposition rétrospective d’un des plus jeunes média de l’art contemporain, la vidéo. Visite en 60 moniteurs.


Vue générale de l'exposition
© Olivier Anselot
Le Fresnoy
Soixante vidéos, soixante artistes, dix-huit pays sont présentés dans l’ancienne salle de bal du Fresnoy, Studio National des arts contemporains, à Tourcoing. Au travers de cette exposition, le commissaire, Michel Nuridsany, tente de définir l’art vidéo, à l’heure où l’usage du médium s'est banalisé et où les œuvres prolifèrent. Près de quarante ans après les premières expérimentations, quelle définition de l’art vidéo peut-on proposer ? C'est pas du cinéma !, l'affirmation, lapidaire, rappelle que la vidéo ne doit pas être vue comme un dérivé cinématographique mais davantage comme une «photographie animée», telle est la proposition de Nuridsany.


Les fruits, 2000
Lee You-Kyung
Courtesy Le Fresnoy
Les premières expériences vidéo sont menées par le groupe Fluxus, vers 1965. Le médium est vite popularisée par l’arrivée du Portapak, système portatif inventé par Sony. Dès lors plusieurs usages vont être faits de la vidéo, de manière souvent concomitante, privilégiant la manière documentaire ou la visée strictement esthétique. Toutes ces utilisations sont représentées dans l’exposition. Michel Nuridsany a évité toute mise en scène de l’objet vidéo. Il est replacé dans le cadre qui lui revient, sur un moniteur aux dimensions modestes, posé à terre, imposant au spectateur une relation de proximité avec l’œuvre. Le parti adopté n’est pas didactique, la disposition des moniteurs ne décrit pas de parcours chronologique. La volonté n’est pas, à l’évidence, de faire une présentation historique et exhaustive de l’art vidéo. Les figures historiques sont présentes mais il demeure quelques curieuses absences. Si le pionnier du bricolage vidéo, initiateur d’une utilisation du médium comme forme d’art autonome, Nam June Paik, est représenté avec Global Groove, Bruce Nauman, Thierry Kuntzel ou encore Peter Campus ont été omis. La représentation de la création contemporaine s'en trouve donc privilégiée, à noter également que le foyer de création asiatique trouve sa juste place au sein de la sélection, avec une quinzaine d'artistes présentés.

Au travers de l’exposition, se dessine l’évolution des pratiques et des usages au cours des quinze dernières années. Si Pipilotti Rist expérimente encore, au milieu des années 1980, le matériau vidéo, et Paul-Armand Gette, l’élément temporel, la jeune génération semble privilégier un usage documentaire et la vidéo, se faire témoignage, outil d’intervention, à la fin des années 1990. Cette tendance s’illustre avec brio chez Du Haibin ou encore Anri Sala. La vidéo n’est plus employée pour ses spécificités, et la définition proposée par Nuridsany semble alors peu appropriée, dans ces travaux qui pourraient aussi bien s’imaginer sous une forme cinématographique. Le cinéma est parfois convoqué de manière explicite, comme dans l’œuvre de l’américain Matt Morello, The artist trilogy, qui renvoie aussi à la mise en scène de l'artiste lui-même, dans l'espace de la vidéo, sur un ton souvent ironique, comme peut le faire, sur un mode différent, Pierrick Sorin. Mais les années 1990 sont aussi celles de ce que l'on nomme le mixed media, une pratique artistique mêlant toutes les formes d'expression. Et c'est là, le principal défaut de cette exposition, qui laisse entendre que la vidéo peut, encore aujourd'hui, être perçue comme une forme d'art autonome.








 Raphaëlle Stopin
06.03.2002