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Politique culturelle

La Caixa, prophète de l'art contemporain à Barcelone

La Fondation La Caixa, émanation de la puissante caisse d'épargne catalane, inaugure aujourd'hui son nouveau centre culturel.


Juan Muñoz, Conversation piece,
1995
La Caixa, la plus puissante caisse d’épargne d’Europe, a récemment fait parler d’elle en France, lorsque sa filiale y a enfreint un tabou tenace en proposant la rémunération des comptes courants. En Catalogne, la Caixa est beaucoup plus qu’une banque. Elle est, par l’intermédiaire de sa fondation, un mécène, un philantrope, un collectionneur dont le budget annuel avoisine 150 millions d’euros. Son directeur général pendant une décennie, Luis Monreal, vient de la quitter pour prendre la direction de la Fondation Aga Khan à Genève. Il a eu le temps de superviser la dernière opération d’envergure, la réhabilitation d’un édifice Art nouveau pour y créer un centre culturel, au pied de la colline de Montjuich.

La filature Casaramona a été édifiée en 1909 par Josep Puig i Cadafalch, l’un des grands architectes modernistes du tournant du siècle, auteur par ailleurs de la casa Amatller et de la casa Marti, où s'installa le fameux cabaret des Quatre Gats. Une fois abandonnée l’activité industrielle, en 1920, la filature a accueilli les bureaux de la police. Achetée par la Caixa en 1964, elle a été déclarée monument historique en 1976. Sa restauration, qui vient de s’achever, a coûté 30 millions d’euros. Elle a vu la collaboration des architectes Roberto Luna, Francisco Javier Asarta, Robert Brufau et Arata Isozaki, ce dernier ayant conçu le patio à ciel ouvert et le vestibule, où trône une fresque de Sol LeWitt. Les travaux ont fait passer la surface utile de 7500 à 12000 mètres carrés. Désormais intitulé CaixaForum, ce nouvel espace disposera d’une médiathèque, d’un auditorium, d’un «laboratoire des arts» et de trois salles d’exposition. Il complètera la programmation du centre culturel du Passeig Sant Joan


Joseph Beuys, Hinter dem Knochen
wird gezählt. SCHMERZRAUM
, 1983
Mais la «révolution», c’est que la Caixa disposera désormais d’un espace permanent pour exposer sa collection d’art contemporain, tenue pour l’une des plus complètes d’Europe. Constituée sous les ordres d’un comité international et de la commissaire María Corral, elle compte aujourd’hui 800 œuvres, qui seront exposées par roulement. Le fonds est centré sur les années quatre-vingts et mêle des artistes confirmés à l’époque – Joseph Beuys, Giovanni Anselmo, Mario Merz, Jannis Kounellis, Sigmar Polke – aux jeunes plasticiens en devenir qu’étaient Antonio Muñoz, Miquel Barcelò, Juan Uslé, Rachel Whiteread ou Fiona Rae. Le premier accrochage réunit 72 œuvres. Le nouveau Caixa Forum, qui est tout proche du pavillon conçu par Mies van der Rohe pour l’Exposition internationale de 1929, prévoit d’organiser des rencontres sur l’art actuel, dont la première se déroulera dès le mois prochain. Avec un thème d’étude aux développements inépuisables : quels discours l’art contemporain génère-t-il ?


 Rafael Pic
27.02.2002