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Expositions

Jules Breton : le peintre des champs

Le musée des Beaux-Arts d’Arras redécouvre les talents d'un artiste loué par Théophile Gautier et critiqué par Baudelaire.


Jules Breton, Le rappel des glaneuses
© Musée des beaux-arts d'Arras
Quelle est la place de l’artiste dans l’histoire de l’art du 19e siècle ?
Annette Bourrut Lacouture, commissaire de l'exposition.
Né à Courrières (Pas-de-Calais) en 1827, Jules Breton grandit dans une famille bourgeoise d’origine paysanne. Sensible à la révolution de 1848, sa production se révèle souvent liée au mouvement réaliste, présidé par Millet et Courbet. Ses premières toiles présentées au Salon datent des années 1849-50 : Misère et désespoir et la Faim. Après des études à Gand, sous l’égide de Félix De Vigne, il rejoint Paris et l’atelier Drölling ( 1847). Malgré un enseignement académique, l’artiste s’intéresse très vite à la vie des champs. Ses premières études en plein air datent des années 1850 : le Retour des moissonneurs (1853) ou le Glaneuses (1855). Ce dernier tableau lui valut un succès au Salon. Il se consacre dès lors à ce type de représentations en insistant sur le thème de la femme dont il admire la beauté, la grandeur et la dignité dans les taches quotidiennes.

Quelles ont été ses relations avec ses contemporains ?
Annette Bourrut Lacouture.
Jules Breton ne peut être considéré comme un peintre parisien au même titre que Gervex. S’il est sensible aux honneurs et à la gloire, il reste attaché à son terroir. Parmi ses amis, on peut compter des artistes comme Bougueraud ou Jules Dupré, des poètes comme Théophile Gautier et des écrivains comme Mistral. Son admiration pour Millet, Corot et les peintres de Barbizon est évoquée dans sa correspondance. De l’enseignement d’Ingres, l’artiste conserve un grand sens de l’observation, essentiellement dans le domaine du dessin. Nombre d'autres influences peuvent être évoquées : Delacroix, Daumier dans ses premières toiles, Holbein dans ses figures de Pardons bretons ou Raphaël.


Jules Breton, Le chant de
l'alouette

© Musée des beaux-arts d'Arras
Pourquoi l’artiste a-t-il eu un tel succès aux États-Unis ?
Annette Bourrut Lacouture.
L’artiste a été très tôt mis en contact avec un collectionneur américain, Samuel P. Every. Son succès est immédiat. Déjà fervents admirateurs des œuvres de Millet, Meissonnier ou Daubigny, les Américains apprécient l’œuvre de Breton comme en témoigne la présence de nombreuses toiles dans les musées nationaux. Le Metropolitan Museum de New York possède une Tricoteuse assise sous un arbre, l’Art Institute de Chicago nous a prêté le Chant de l’alouette tandis que le Joslyn Art Museum a acquis les Vendanges à Château Lagrange (1964) et les Sarcleuses(1860). Certaines toiles n’avaient jamais été montrées dans les musées français comme le Grand Pardon breton de 1869 appartenant au musée de la Havane.

Cette exposition a-t-elle permis des découvertes ?
Annette Bourrut Lacouture.
Effectivement, parmi les 100 peintures et les 18 dessins présentés, deux toiles importantes ont été retrouvées : Femmes récoltant des pommes de terre, localisée à Philadelphie et retrouvée dans un musée de Dublin, ou la Saint-Jean aujourd’hui conservée dans une collection particulière américaine. Je prépare actuellement le catalogue raisonné de l’artiste et j’espère bien faire d’autres découvertes. J’insiste sur la qualité de ce peintre dont la réhabilitation n’a pas été à la hauteur de son talent. Son influence est pourtant perceptible chez des peintres anglais (Walker), américains (W. Homer et I. Johnson), nordiques ou italiens, comme certains «macchiaioli».


 Stéphanie Magalhaes
17.04.2002