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Marché

Duo de Guardi chez Christie's

Pour sa première vente parisienne de dessins, la maison de ventes propose l’impressionnante collection de Pierre Decourcelle.


Francesco Guardi, La Scuola
S. Marco avec la plate-forme
temporaire érigée
, 1782,
236 x 269 mm
Estimation : 250 / 350 000 €
Stratégie oblige, l’auctioneer a choisi la Semaine du dessin et son afflux de collectionneurs internationaux pour disperser en deux sessions un ensemble de lots dans lequel figure l’exceptionnelle collection Decourcelle. Soit dix dessins du 18e siècle estimés à 900 000 €, une somme supérieure à celle que devraient rapporter les 120 œuvres graphiques maniéristes italiennes réunies par Pierre de Charmant et dispersées dans le courant de l’après-midi… Ces pièces, Pierre Decourcelle les achète auprès de marchands parisiens en moins de deux années, entre 1911 et 1912. Et il y est suffisamment attaché pour décider de les conserver à l’heure où il se sépare de ses œuvres modernes, en 1926. Depuis lors, les dessins signés de la main de Francesco Guardi et de celle de son contemporain Giovanni Raggi ou les craies de Fragonard et Hubert Robert demeuraient donc dans la famille. «D’expérience, je sais qu’il est très rare de trouver une collection intacte depuis près de cent ans, surtout une collection d’une qualité aussi haute et constante», explique Nicolas Schwed, spécialiste des dessins à Christie’s Paris. «Souvent, on trouve quelques très belles feuilles et d’autres moins intéressantes. À l’époque, les collectionneurs ne disposaient pas d’autant de renseignements qu’aujourd’hui et il n’est pas rare que l’attribution de certaines pièces doive être revue.»


Francesco Guardi, Une vue du
Campo S. Zanipolo avec la plate-
forme temporaire érigée contre
la Scuola S. Marco
, 1782,
325 x 340 mm
Estimation : 200 / 30 000 €
Si la qualité des œuvres est globalement haute, deux d’entre elles se distinguent cependant : des dessins réalisés par Francesco Guardi à l’occasion de la visite du Pape Pie VI à Venise, en mai 1782. Le peintre de vedute avait en effet été chargé par la République Sérénissime d’immortaliser les évènements marquants de ce séjour de quatre jours : l’arrivée du Pape accueilli par le Doge, la messe célébrée à San Giovanni e Paolo, Pie VI descendant du trône pour aller à la rencontre du Doge et la bénédiction de la ville sur une loggia spécialement construite pour l’occasion. La Scuola S. Marco avec la plate-forme temporaire érigée et Une vue du Campo S. Zanipolo avec la plate-forme temporaire érigée contre la Scuola S. Marco sont des dessins préparatoires aux deux compositions que Guardi réalisa pour ce dernier sujet. Seul évènement public de la visite, la bénédiction pontificale avait sans doute rencontré plus de succès. On conserve ainsi quatre versions peintes correspondant au premier dessin et trois pour le second. Réalisés à la craie noire, à la plume, à l’encre grise et au lavis brun, ils ont été saisis durant les quelques journées où cette architecture temporaire fut en place. Acquis pour 6 600 FF et 5 000 FF, ils pourraient aujourd’hui atteindre respectivement 350 000 € et 300 000 €.


 Zoé Blumenfeld
21.03.2002