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Expositions

Felice Beato, Sleeping Beauties
© The Wilson Centre for Photography


Masahisa Fukase, Man in hat
© Fukase Estate and Stephen Wirtz Gallery, San Francisco


Naoya Hatakeyama, Tree image with river
© Copyright of the artist.


Le Japon se tire le portrait

Le Victoria & Albert Museum présente trois photographes, qui illustrent les grands moments du pays. Charlotte Cotton, commissaire, évoque ces différents parcours.

Pourquoi avoir exposé des œuvres aussi séparées par le temps ? Y-a-t-il des similitudes entre elles ?
Charlotte Cotton. Ces trois artistes sont très différents. Le but de l’exposition n’est pas de suggérer une relation entre les œuvres, mais plutôt de montrer des images très importantes de l’histoire de la photographie japonaise. Felice Beato, (1830-1904), a été le premier photographe à partir au Japon et à le photographier. Son œuvre laisse un témoignage de la société japonaise de la seconde moitié du 19e siècle et décrit ses paysages. Nous avons choisi des œuvres réalisées à des périodes essentielles de la culture japonaise. C’est le lien entre ces trois artistes. Masahisa Fukase, (né en 1934), fait partie des artistes qui ont marqué l’après seconde guerre mondiale. Son style est éclatant. Il faisait partie d’un groupe d’artistes japonais le « Provoke Group », un groupe très influencé par les photographes américains, comme William Klein. Les œuvres de ce mouvement sont en général en noir et blanc, avec beaucoup de gris. Le but de ces photographies est de représenter la politique du Japon, les émotions du pays après la seconde guerre mondiale. En général, le Japon de l’après-guerre est reconnu pour avoir été le pays le plus innovateur et le plus créatif en matière de livres de photographies. Dans ce domaine, Fukase a apporté énormément. Le troisième artiste exposé, Naoya Hatakeyama (né en 1958), a été remarqué ces dernières années sur la scène de la photographie internationale. Il a notamment participé à la Biennale de Venise. La résonance internationale de son œuvre démontre que le Japon se maintient à un niveau de grande qualité en photographie. Nous aurions pu envisager cette exposition de différentes manières. Mais l’histoire de la photographie est très complexe. Dans cette installation, nous suggérons sa longueur et son excellence à travers 120 œuvres de ces trois artistes.

Quelle fut la vie de Beato ? Quelle a été son influence sur Hatakeyama et Fukase ?
Charlotte Cotton. Felice Beato était italo-britannique, son père était italien, sa mère anglaise. On sait peu de choses sur sa vie, il s’est installé au Japon vers 1863 et y est resté jusqu’à sa mort en 1907. On suppose que c’est la date de sa mort, car on a gardé la trace d’une vente de tout ce que contenait son studio cette année-là. Mais nous n’avons aucun enregistrement de sa mort. A cette époque-là, il n’était absolument pas connu en tant que photographe. Il possédait quelques maisons et avait une activité commerciale, mais il n’était pas un très bon homme d’affaires. On ne peut pas dire qu’il ait eu une influence sur Hatakeyama et Fukase, les trois artistes n’ont aucune relation directe.

Pouvez-vous nous parler de la collection de photographies du musée Victoria & Albert et de vos projets d’expositions ?
Charlotte Cotton. La collection a débuté dès la fondation du musée, en 1850, elle comprend des œuvres de 1839 à nos jours et est très variée, nous avons aussi bien des photos de mode, que des reportages, etc. Nous n’exposons pas les photographies du 19e siècle plus de six mois. Le niveau de luminosité est maintenu très bas lors des expositions. En mai 1998 nous avons ouvert la galerie de photographie Canon, grâce aux dons de la société Canon. Depuis nous y avons réalisé des expositions en continuité. Notre prochaine installation s’intitule Things – Things et présentera des natures mortes d’Irving Penn, de Bill Brandt et Roger Fenton.


 Laure Desthieux
20.09.2001