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Expositions

Jost Haller Livre de prières de Lorette d'Herbeviller, Saint Michel, vers 1470, Enluminure sur parchemin - © Bibliothèque Nationale de France, Paris


Martin Schongauer Saint Michel, Burin, 15.9x11.3 cm - © Musée d'Unterlinden, Colmar


Jost Haller Retable du Tempelhof de Bergheim (détail), vers1445, huile sur bois, 89.5x213 cm - © Musée d'Unterlinden, Colmar


Jost Haller : le peintre inconnu a enfin un nom

Récemment tiré de l’oubli grâce à l'historien d'art Charles Sterling, le peintre du 15e siècle Jost Haller reprend vie à Colmar.

C’est dans les années 1980 que Charles Sterling met au jour le nom de Jost Haller, exploit notable pour les artistes mal documentés du 15e siècle. Persuadé du rôle qu’il a joué dans le contexte artistique allemand, Sterling découvre qu’il a grandement contribué à la formation de l'artiste Martin Schongauer. Tiré de l’oubli, Jost Haller fait l’objet, dix ans après Martin Schongauer, d’une exposition au Musée d’Unterlinden. Le musée propose de mettre en perspective l'oeuvre d'un artiste de qualité et l'activité d’un milieu artistique particulièrement fécond, celui du Rhin supérieur à la fin du Moyen-âge.

L’identification du peintre, menée par Charles sterling, dans les années 80, a été possible grâce à l’étude de deux tableaux du 15e siècle, présents dans une collection privée allemande. «Ces deux tableaux acquis après la révolution font partie des rares œuvres qui ont survécu à la destruction massive par l’église luthérienne de peintures religieuses dans une Strasbourg sinistrée au début du 16e siècle» explique Philippe Lorentz, commissaire général de l’exposition. Bouleversée par les réformes religieuses issues des idéologies lutheriennes, Strasbourg fut le théâtre d’un véritable génocide pictural. De ce massacre ne sont parvenues jusqu’à nous qu’un nombre restreint d’œuvres fragilisées par le temps et dispersées au sein de collections françaises et allemandes.

Strasbourg, grande et riche cité du bassin supérieur du Rhin, brillait par son architecture religieuse du gothique flamboyant. Elle est au 15e siècle un carrefour culturel et intellectuel important où une bourgeoisie enrichie par le commerce s’entoure des plus grands artistes et de somptueuses bibliothèques… «Dans cette région, une technique sur cuivre fait son apparition chez les orfèvres, que l'on appelle la gravure en taille douce» précise Philippe Lorentz. Afin de mieux cerner ce foyer artistique actif, le musée d’Unterlinden a réuni autour des œuvres de Jost Haller, au nombre de 40, une soixantaine d’œuvres de la même époque prêtées exceptionnellement par des musées français et allemands, dont les exécutants restent inconnus à ce jour. Parmi des panneaux peints, les précieux retables de Stauffenberg (Colmar), des manuscrits enluminés, des dessins, notamment ceux du Maître des Études de draperies, des gravures de Schongauer Le beau Martin… Face à eux, le fameux retable d’Haller la Prédication de Saint Jean-Baptiste et le Combat de Saint Georges et le Dragon (vers 1445-1450), conservé au musée d’Unterlinden. Sans oublier le Livre de prières de Lorette d’Herbeviller ; enluminé par Jost Haller et prêté, exceptionnellement, par la Bibliothèque Nationale. Ce dernier a été décousu, afin de le présenter feuille par feuille. Juste avant qu'il ne rejoigne l'atelier des restaurateurs.


 Souad Hali
19.09.2001