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Expositions

Depero et Marinetti endossent les gilets futuristes de Depero, Turin, 1925 © Archivio


Fortunato Depero, Lizzana, 1923, marqueterie d'étoffes, Museo Civico di Rovereto.


Rome, retour vers le futurisme

Emmené par Marinetti, le futurisme a secoué l'Italie de la première moitié du siècle. Le commissaire de l'exposition présentée à Rome, Enrico Crispolti, nous précise ses ambitions.

Qu'apporte cette nouvelle exposition par rapport à la rétrospective de Palazzo Grassi, à Venise, en 1986 ?
Enrico Crispolti.
Palazzo Grassi, cela fait déjà 15 ans. C'est beaucoup, presque une génération. D'autre part, l'exposition de Venise avait présenté des oeuvres essentielles mais elle s'arrêtait en 1918 et n'abordait pas systématiquement tous les champs d'activité des futuristes. Les limites du futurisme, né en 1909 avec le manifeste publié sur « Le Figaro », vont au-delà de 1918. Le mouvement étant soudé autour de son leader, comme a pu l'être le surréalisme autour de Breton, il convient de les repousser jusqu'à la mort de Marinetti, en décembre 1944. Enfin, outre la peinture ou la sculpture, le futurisme a touché l'architecture, la publicité, la musique et même le mail art. En somme, tous les domaines de la vie. Arte-vita était d'ailleurs l'un de leurs slogans.

Est-ce l'occasion de réévaluer certains artistes ?
Enrico Crispolti.
Nous avons bien sûr accordé l'importance qu'il convient aux principaux artistes du mouvement comme Balla, Carrà ou Boccioni, qui est mort très tôt, en 1916, sur le front. Avec 16 tableaux présentés, il s'agit pour ce dernier d'une véritable mini-rétrospective. Dans la période moins connue, qui va des années 1920 aux années 1940, l'art mécanique, le purisme géométrique de Depero, de Prampolini ou de Dottori les rapprochent d'Ozenfant ou de Jeanneret, qui allait devenir Le Corbusier. Fillia ou Oria présentent des affinités avec Abstraction-Création ou Cercle et Carré. L'aeropittura, qui synthétise, dans une vision cosmique, des paysages vus d'avion (mais il s'agissait alors de petits avions, qui volaient bas), permet de mettre en avant Tato ou Crali. Nous présentons aussi un intéressant tableau de Benedetta Marinetti, la femme de Marinetti, qui appartient au musée d'art moderne de la ville de Paris.

Que reste-t-il du futurisme dans l'art contemporain ?
Enrico Crispolti.
On peut déceler une certaine filiation, surtout au niveau du comportement ou de la mentalité, chez Vedova ou Fontana. L'un des grands legs du futurisme, c'est l'entrée en scène, dans l'art, de la métropole moderne, de la masse. A titre d'exemple, les affiches deviennent pour les futuristes de véritables « tableaux de rue ». Un autre héritage important des futuristes, qui aimaient les actions spectaculaires, c'est bien sûr, le happening, qui a marqué tout l'art contemporain.


 Rafael Pic
13.09.2001