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L'espionnage a son musée

Des anciens membres de la CIA se cachent derrière le futur Musée international de l'espionnage.

WASHINGTON, 21 avr (AFP) - Des vétérans du renseignement, surtout des anciens de la CIA mais aussi un ex-général du KGB, viennent de se retrouver, à découvert, pour faire sortir de l'ombre le futur Musée international de l'espionnage à Washington. "Dans cette ville, il y a toujours des activités d'espionnage: au moment où je parle, quelqu'un utilise une boîte à lettre" pour donner des informations clandestines, a déclaré cette semaine à la presse Peter Earnest, directeur du musée, qui ouvrira ses portes en juin prochain. Le but, souligne cet ancien cadre de la CIA, l'Agence centrale de renseignement américaine, "n'est pas de glorifier les espions, bien que certains furent des héros" - de George Washington contre les Anglais au cinéaste John Ford - mais d'éduquer le public sur l'histoire et le rôle du renseignement dans le monde. L'idée est aussi d'inscrire ce musée privé (coût de création: 36 millions de dollars) dans le déjà riche circuit du tourisme de la capitale des Etats-Unis.

L'International Spy Museum, qui se veut le plus complet du monde en la matière, est situé non loin du siège du FBI (police fédérale) et jouxte paradoxalement l'ancien siège du parti communiste américain. Plusieurs trophées à la James Bond racontent l'imagination des espions en temps de guerre comme de paix. Une mini-caméra tchèque permettait à la Stasi est-allemande de photographier par un trou de l'autre côté du mur ce qui se passait dans une chambre d'hôtel. Ce morceau de charbon anodin cachait en fait un explosif américain pendant la Deuxième Guerre mondiale. Téléphoner avec sa chaussure comme dans un film ? Presque. Le KGB (l'ex-police secrète soviétique) savait dissimuler un micro-émetteur dans le talon d'un soulier à l'insu de son propriétaire. Made in Russia toujours, ce bel étui de rouge à lèvres servant de pistolet. On pourra voir aussi un rare exemplaire d'Enigma, la machine à coder des Allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale, que des Polonais et Britanniques finirent par déchiffrer. En revanche, assure Peter Earnest, "pour ne pas compromettre" les secrets des services américains, "nous n'exposerons pas de techniques classifiées, trop contemporaines". A côté de films et de conseils en déguisements on trouvera, sur 6.000 m2, la reconstitution d'une chambre d'interrogatoire ou d'une cellule de la sinistre prison Loubianka de Moscou. "C'est toujours un curieux plaisir de se présenter sous son vrai nom", estime Peter Earnest. Oleg Kalugin n'a plus besoin de pseudonyme. Cet ancien général du KGB est aujourd'hui persona grata à Washington, où il enseigne dans un Centre de contre-espionnage. La CIA fut impliquée dans un certain nombre de coups tordus dans le monde, mais "sans commune mesure avec la brutalité des services soviétiques, auteur d'inombrables meurtres sans scrupules en Russie et à l'étranger", dit-il à l'AFP. La CIA a clairement donné sa bénédiction. Deux anciens directeurs, William Webster et l'amiral Stansfield Turner, font partie du comité de direction du musée. "Nous ne sommes pas impliqués dans cette entreprise privée mais nous leur souhaitons bonne chance", a déclaré Tom Crispell, un porte-parole de l'agence. "D'après ce que nous savons, on va présenter les choses, sans en rajouter, pour éduquer le public sur l'importance du renseignement dans le monde. C'est une bonne chose", ajoute M. Crispell . A son siège de Langley, près de Washington, la CIA dispose d'un musée privé, réservé à ses seuls hôtes officiels, ainsi que d'une exposition semi-permanente de gadgets de la Guerre froide, venant du grand collectionneur spécialisé, Keith Melton. La très secrète Agence de sécurité nationale (NSA), qui s'efforce d'écouter et comprendre l'ensemble des communications sensibles de la planète, dispose, quant à elle, au nord de la capitale, d'un petit musée ouvert au public dédié à la cryptologie.

Par Jean-Michel STOULLIG

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  AFP
27.04.2002