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La jeunesse dessine un nouvel art de vivre

Les designers européens de demain tiennent salon au Carrousel du Louvre et inventent notre futur environnement.


Design Faltazi, Objets faltaziens
© European way(s) of life
La vénérable Société des artistes et décorateurs a, derrière elle, cent ans d’activité et plus d’une cinquantaine de salons destinés à la promotion du design contemporain et à l’organisation de rencontres entre industriels, créateurs, distributeurs, écoles, techniciens et consommateurs… Cette année, la tradition se renouvelle. Les salons bisannuels créés par et pour les professionnels ont cessé depuis 1990, pour cause de récession économique. Le renouveau et la prise de risque viennent à présent des écoles. D’où l’idée d’inverser la donne en organisant une manifestation destinée au grand public et faisant la part belle aux jeunes créateurs venus d’une vingtaine de pays d’Europe. «Notre but», explique Gérard Vallin, vice-président de la SAD, «c’est de montrer les tendances nouvelles dans un lieu aussi prestigieux que le Carrousel du Louvre, avec l’espoir favoriser la diffusion de certains des projets. Ce n’est pas un salon à but commercial mais plutôt un rêve d’enfant». Le rêve des organisateurs qui ont travaillé bénévolement à la conception du salon et celui des 500 jeunes artistes qui ont imaginé près de 2000 projets originaux.

À travers une dizaine de thèmes, comme le corps, la maison, le lieu de travail ou l’école, ils proposent leur vision du monde futur. L’innovation est formelle, bien sûr, mais aussi technique. Car si les nouvelles technologies sont souvent au cœur des projets, elles sont exploitées sous des axes bien différents. Certains poussent plus avant la création de nouveaux objets : le porte-monnaie intelligent qui indique la somme qu’il contient, les vêtements qui s’ornent de motifs qui apparaissent ou disparaissent en fonction de la chaleur (Catherine Serre)… D’autres développent des méthodes entièrement nouvelles, comme l’agence nantaise Faltazi et son réseau destiné à la création et à la distribution instantanée d’objets achetés sur Internet en s’appuyant sur la technique de l’imprimante 3D, jusqu’ici réservée à la conception de maquettes. Avec le grand avantage de pouvoir inventer des formes inédites dont la seule contrainte est d’avoir un nœud central.


J.P. Vitrac, Comebike
© European way(s) of life
Pour tous ces créateurs, l’un des maîtres-mots semble être l’adaptabilité aux changements de situations, de besoins ou d’atmosphères… Les lieux de travail et d’apprentissage sont les premiers visés par cette évolution. Loin de la traditionnelle école aux tables de bois, l’école de B.E. Concept a une estrade coulissante et des pupitres modulaires qui permettent plusieurs configurations adaptées aux différentes activités scolaires. Quant aux bureaux, ils sont ajustables dans des espaces ouverts chez Brukhardt Leitner qui propose des unités isolées visuellement et acoustiquement, évolutifs chez Inhiy Byun qui conçoit des supports d'ordinateurs en plastique agrandissables grâce à un système de chevilles. Ils sont même transportables comme l’«hybride» de Djordje Bjelobrk qui s’installe facilement, dans un café, un bureau, une chambre ou un aéroport.

Heureusement, designers, architectes et décorateurs semblent aussi se soucier de notre plaisir ! À ce titre, le rayon alimentation, est particulièrement attrayant, sollicitant le goût et les autres sens. Les chocolats de Julia Kunkel sont moulés sur des parties du corps et constituent des puzzles qui incitent à une découverte tactile. Une table lumineuse de Julian Appelius et Fabien Dumas fait briller les objets qui y sont posés et les doigts des convives. Quant aux espaces de dégustation rêvés par Sogeres, ils proposent une détente «personnalisée». La cantine des écoliers de 6 à 12 ans est un lieu de repos éducatif avec son sas de «décompression» et ses grandes pommes rouges dans lesquelles ont été aménagés des lavabos. Et le restaurant «L’imprévu» invite à une consommation à l’envi : l’architecture et le mobilier épousant le corps de chacun, qu’il soit assis, couché, debout ou accoudé. Cadre pour le développement d’une nouvelle cuisine où les plats se succèdent par couches successives dans un même récipient vertical, sonnant la fin du service à la russe…


 Zoé Blumenfeld
08.05.2002