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Marché

Duchamp au secours de Phillips

La maison de vente compte sur une exceptionnelle série de ready-mades pour talonner les leaders du marché.


Marcel Duchamp, Fontaine, 1964
Fountain 1917, Edition galerie
Schwarz, Milan, 36 x 48 x 61 cm
Estimation : 1,5 / 2,5 millions $
© ADAGP
Moins d’une semaine après les records atteints par les œuvres de Brancusi, Cézanne, Magritte ou Giacometti lors des ventes de Christie’s et Sotheby’s, c’est au tour de l’art contemporain d’enflammer New York. Contraint d’annuler sa vente d’art impressionniste et moderne prévue pour le 6 mai, Phillips, de Pury & Luxembourg compte bien mettre à profit cette occasion pour réaffirmer sa position parmi les leaders du marché. Pour ce faire, la maison met en vente aujourd’hui une cinquantaine d’œuvres dont un ensemble de ready-mades de Marcel Duchamp estimé entre 8,5 et 12,6 millions de dollars. Normalement destinées à la vente d’art moderne, ces œuvres ont rejoint le catalogue d’art contemporain, Daniella Luxembourg -l'un des principaux actionnaires depuis le désengagement de Bernard Arnault- arguant du fait qu’il s’agit là de «donner à Duchamp son importance séminale dans l’art contemporain». Une autre explication semble pourtant évidente : mieux vaut disperser ces pièces importantes lors des prestigieuses ventes de New York qu’à Londres, au mois de juin prochain. Il s’agit en effet du dernier ensemble complet de ready-mades édités par la galerie milanaise Schwarz à figurer entre des mains privées.


Francis Bacon, Étude pour le
portrait d’Henrietta Moraes
,
huile sur toile, 198 x 147 cm
Estimation : 5 / 7 millions $
© ADAGP
En 1964, le galeriste Arturo Schwarz convainct Marcel Duchamp de produire dix nouvelles séries de ses quatorze œuvres favorites. Huit d’entre elles ont été dispersées ou figurent dans les collections de musées nord-américains, le musée des Beaux-Arts du Canada à Ottawa et l’Indiana University Art Museum de Bloomington. Les deux dernières, signées et dédicacées, étaient destinées à Duchamp, qui fit don de la sienne au Centre Pompidou, et à Arturo Schwarz qui l’a conservée dans sa collection jusqu’à ce jour. Ces pièces en excellent état sont tirées des créations des années 1913 – 1920. Outre l’inaugurale Roue de bicyclette qui pourrait atteindre les 3 millions de dollars, le Porte-bouteilles (800 000 $) ou la fameuse Fontaine, un urinoir signé R. Mutt pour signifier la «mut»ation de l’objet opérée par l’œil de l’artiste (1,5 millions $), on trouve un peigne intitulé 3 ou 4 gouttes de hauteur n’ont rien à faire avec la sauvagerie (200 000 $) ou le Pliant de voyage, une machine à écrire Underwood dans son emballage d’origine (300 000 $).

En plus de cet ensemble, Phillips a réuni des lots plus conformes à ceux sélectionnés par ses concurrents. Côté Pop Art, on trouve Noise d’Ed Ruscha (1 millions $), une toile de 1963 à inscription jaune sur fond bleu très similaire au Talk about space mis en vente demain par Christie’s, ainsi qu’un Autoportrait d’Andy Warhol, daté de 1986 et estimé à 3 millions de dollars, version rouge et estampillée de celui qui figure en couverture du catalogue de la vente Sotheby’s du 15 mai. De même, Phillips et Sotheby’s proposent chacun une esquisse de Francis Bacon provenant de la Malborough Fine Art de Londres : une étude en grand format de 1964 pour le Portrait d’Henrietta Moraes pour le premier (5 millions $) et une étude postérieure pour Le corps humain (2,5 millions $) pour le second.


 Zoé Blumenfeld
13.05.2002