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Politique culturelle

La France à l'heure bohême

La Saison tchèque vient de commencer, avec un programme de près de cinq cents manifestations. Son commissaire, Olka Kubelkova Poivre d'Arvor, nous en anticipe les grands moments.


Vladimír Fuka, Kamil Lhoták,
Cadavre, 1951
© National Gallery in Prague
Pourquoi une saison tchèque ?
Olga Kubelkova Poivre d’Arvor, commissaire de la Saison tchèque avec Frédéric Mitterrand.
Les Français et les Tchèques sont liés depuis huit siècles, depuis qu’un marchand franc du nom de Samo fédéra une nation slave comme nous l’apprend la Chronique dite de Frédégaire, rédigée en Bourgogne. Mais les Français connaissent très mal ces liens et les Tchèques ont été très marqués par la «trahison» française à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Notre objectif est de rétablir des ponts en allant au fond des choses et en attirant beaucoup de jeunes. Le lancement officiel aura lieu le 25 juin avec Ondine de Dvorak. Mais la saison est déjà en marche depuis le début du mois. Les 23 et 24 mai, un colloque a célébré la mémoire de Masaryk.

Pouvez-nous fournir une brève description «chiffrée» de la manifestation ?
Olga Kubelkova Poivre d’Arvor.
Cela fait deux ans que nous travaillons à l’organisation de cette saison. Au budget de 40 millions de francs ont contribué à parts égales par le ministère de la Culture tchèque et les institutions françaises (ministère des Affaires étrangères, DRAC, etc). A cela s’ajoutent les contributions des sponsors privés. Il s’agit d’une manifestation de très grande envergure : au total, ce sont 480 projets qui ont été menés à terme dans cent villes de France. Paris est bien sûr au cœur des manifestations mais d’autres villes symboliques pour les relations bilatérales sont mises en avant comme Dijon (Charles IV était souverain de Bourgogne), Limoges, qui est jumelée avec Plzen, ou Lille, qui accueillera la plus grande exposition dédiée au baroque tchèque.


Le Christ au Jardin des Oliviers,
Bohême, vers 1730, bois polychrome,
152 x 190 cm, musée de Vysoke Myto,
exposition au musée des beaux-arts
de Lille, du 14/10 au 31/12/2002
Quels secteurs de la création vont être abordés ?
Olga Kubelkova Poivre d’Arvor.
La musique constituera le volet le plus important. Pour les Tchèques, elle est au centre de la vie quotidienne. Mais nous accorderons également une grande importance au cinéma, avec la Nouvelle Vague tchèque et des films inédits des années quarante, et à la littérature avec des événements sur Kafka. Cet été, à Avignon, deux soirées seront organisées autour de Vaclav Havel. Il y a vingt ans, Vaclav Havel était en prison et une nuit lui avait été consacrée. Cette année, ce sera un hommage à l’homme de lettres et non à l’homme d’Etat, qui recevra pour l’occasion le prix du Pen Club. La saison s’achèvera le 11 janvier 2003 avec la Messe glagolithique de Janacek. Et il y aura évidemment la partie arts plastiques.

Dans ce dernier domaine, sur quoi allez-vous mettre l’accent ?
Olga Kubelkova Poivre d’Arvor.
Certains grands moments de la culture tchèque ne seront pas présentés comme les tableaux de maître Théodoric - car il est impossible de sortir du pays des œuvres gothiques -, le cubisme, qui a déjà fait l’objet d’expositions, ou les nombreux Picasso du fonds Kramar, réuni par un grand collectionneur contemporain de Kahnweiler. Nous voulons, en revanche, faire découvrir d’autres aspects des arts plastiques : la création contemporaine ou des génies méconnus comme Frantisek Bilek, scupteur symboliste, et le photographe Sudek.


 Rafael Pic
28.05.2002