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Expositions

Barcelo s'encroûte

L'exposition de la Fondation Maeght, à Vence, présente les œuvres récentes d'un artiste génial mais momentanément en panne d'inspiration.


Barcelo, L'ours blessé
© ADAGP
Photo: Françoise Monnin
Sachant qu'à quarante-cinq ans, la plupart de ses toiles se vendent en galerie aux alentours de 150 000 € et que les plus grands musées d'art contemporain européens lui ont déjà offert leurs cimaises, à quoi peut encore rêver le peintre espagnol Miquel Barcelo ? Pas à grand chose, si l'on en croit l'exposition de Vence, qui présente ses dix dernières années de travail. Si l'on demeure médusé par la vitalité des grandes toiles aux sujets de paysages maliens et de natures mortes espagnoles, des années 1990-1991, et par celle de certaines céramiques, évoquant de gros poissons morts, le reste des œuvres présentées a un goût de fond de tiroir, de resucé, de trop grands formats trop inachevés.

Certes, la matière craquelée, boursouflée, dégoulinante, qui permet à l'artiste d'exceller en matière d'allures tourbillonnantes et patinées, est toujours bien présente. Mais, parfois, elle est bien seule. Ni sujet représenté, ni composition organisée. L'une de ces toiles, justement titrée Peinture pour aveugles, est à ce titre particulièrement frappante. Pour le reste, à l'exception de la série des Ateliers, les sujets abordés laissent sceptique. Ici, un gros nounours qui pourrait illustrer un livre pour enfants, là, un gorille mal esquissé, plus loin, juste trois taches vertes ou, pire encore, le rouleau d'une vague improbable, à ranger de toute urgence au rayon croûte. Côté œuvres sur papier, il n'en va pas mieux. Certains récupérations de taches d'aquarelle et de trous, provoqués par des fourmis africaines et gourmandes, sont habiles. Mais les figures de femmes au coucher du soleil virent à la carte postale kitsch. À croire que le rythme des expositions, imposé par le principal marchand de l'artiste, la Galerie Bischofberger de Zürich, nuit à l'apparition de formes nouvelles. À moins que l'exposition de Vence ne soit que l'occasion de refiler quelques invendus. Miquel, réveille toi, l'art occidental a encore besoin de toi !


 Françoise Monnin
27.05.2002