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Patrimoine

Diane, 1er siècle av. J.-C.


Minerve, 1er siècle av. J.-C.


Les nymphes de Potenza

Le site de Grumentum, près de Potenza, dans le sud de l'Italie, vient de livrer un remarquable ensemble de statues antiques.

Difficile, même pour un amateur de l’Italie, de situer Potenza. Placée tout en bas de la botte, cette ville de c’est la capitale de la Basilicate, qui tire son nom du fait qu’elle était autrefois administrée par un envoyé de l’empereur byzantin, le basilikos. Enclavée, ne disposant que de deux étroites façades maritimes, frappée par des tremblements de terre à répétition, la Basilicate est l’une des régions les plus pauvres de l’Italie. L’exploitation du gaz naturel et une moderne usine Fiat, à Melfi, ont en partie effacé l’image de misère véhiculée par le roman de Carlo Levi, Le Christ s’est arrêté à Eboli, qui prenait pour modèle la fascinante cité troglodyte de Matera. La Basilicate avait dans l’Antiquité une place autrement plus importante, que rappelle l’existence à Grumento d’un musée archéologique national, où les statues pourraient bientôt prendre place. La légende dit que c’est sur les berges du Busento que le chef barbare Alaric se serait fait enterrer avec son immense trésor. Le cours glacé du fleuve aurait ensuite été dévié pour cacher à jamais l’emplacement de la tombe. Certains la cherchent encore… Horace, le poète latin, chante de l’otium, est le plus célèbre enfant du pays.

La découverte rendue publique cette semaine permettra sans doute de replacer la Basilicate sur les cartes. Elle est le fait d’une équipe autrichienne, menée par Hans Jorg Thaler, de l’Université de Vienne, qui opère dans les thermes impériaux de l’ancienne ville romaine de Grumentum. Les cinq statues en marbre, de grandeur nature, qui étaient enterrées sur le site des thermes, étaient autrefois placées dans les niches d’un nymphée. Ce dernier devait être particulièrement éclatant à en juger par les tessèles de céramique également mises au jour. Réalisées au 1er siècle av. J.-C. dans un marbre importé de Grèce, les statues sont, selon Maria Luisa Nava, surintendante à l’archéologie, des réélaborations tardives – sans doute par des ateliers de Rhodes - de prototypes remontant au 4e siècle av. J.-C. Toutes les statues ont perdu la tête et mes bras mais les archéologues ne désespèrent pas de les retrouver au cours des fouilles. Trois d’entre elles représentent des nymphes. Les deux personnages masculins sont un Eros et le dieu Pan, vêtu de sa peau de chèvre. L’ensemble, qui forme une célébration du culte des eaux et de la nature, est l’une des plus remarquables découvertes de statues antiques en Italie du Sud, depuis les extraordinaires bronzes de Riace, trouvés par un plongeur, Stefano Mariottini, au large de Reggio de Calabre en 1972.


 Rafael Pic
08.06.2002