Avignon, papes au palais

D'où vient l’idée d’une exposition sur l’histoire de l’architecture du palais ?
Dominique Vingtain, conservateur du palais des Papes. L’essentiel de l’histoire de la papauté en Avignon réside dans le palais. J’avais envie de présenter l’histoire de son architecture, un genre peu répandu en France. Beaucoup d’études sur le patrimoine ont été faites ces dernières années, mais le public n’y a malheureusement pas accès. Partant du postulat de Ruskin qui dit que « la plus grande gloire d’un édifice réside dans son âge », il était intéressant de faire découvrir différemment le palais, en présentant l’histoire sur le long terme, et de démontrer que cet ensemble gothique n’a cessé d’être modifié depuis le XIVe siècle. L’exposition était l’occasion d’expliquer et d’approfondir la chronologie de sa construction.

N’y avait-il jamais eu d’exposition sur ce sujet si emblématique ?
Dominique Vingtain. Non. Curieusement, il a été difficile de convaincre les responsables et les hommes politiques. Finalement, le maire m’a demandé de mettre en place cette exposition en 2000. Le sujet étant plutôt sensible, j’ai proposé de démonter le musée du Vieil Avignon, qui existe depuis 1922, et de créer une exposition sur l’histoire du palais, de manière à pouvoir réutiliser une partie du mobilier, des outils didactiques pour le futur musée de l’Œuvre du palais des Papes. C’est une avant-première, en termes d’occupation de l’espace et dans la présentation d’objets, de plans et de maquettes spécialement réalisées pour l’occasion. Nous avons beaucoup emprunté, que ce soit aux institutions avignonnaises, parisiennes, qu’à l’étranger, comme certains fac-similés provenant des archives du Vatican.

Comment se présente l’exposition ?
Dominique Vingtain. Elle tient en trois sections chronologiques : « Édifier le palais de notre seigneur le pape », dans la Grande Chapelle de Clément VI, s’attache au XIVe siècle; la seconde, « Adapter », correspond à la période du XVe au XVIIIe siècle, pendant laquelle Avignon a vécu sans le pape, retourné à Rome. Mais la ville est toujours sous la domination de l’Église. Elle ne sera française qu’en 1791; la troisième partie, « Réaffecter et restaurer », s’étend de la fin du XVIIIe siècle à 1970. Sous la Révolution, le palais, baptisé la « Bastille du Midi », a failli être démoli. Le massacre de la Glacière marquera les esprits pendant tout le XIXe siècle. Et, à cause de la guerre de 1870, Viollet-le-Duc n’a jamais pu exécuter son projet de restauration.