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Expositions

Christian Jaccard : point, ligne, nœud

En une trentaine de pièces et objets de décoration, la rétrospective consacrée au travail de l'artiste compose une ode au nœud.


Christian Jaccard.
© Françoise Monnin.
ROUBAIX. «Je ne souhaitais pas faire une “rétrospective”», explique Jaccard. «Je pense que le terme de “confrontation” est plus intéressant. Au sens judiciaire : il s’agit d’instruire un dossier». Le dossier Jaccard est des plus passionnants, comme en atteste la centaine de pièces présentées, allant de la série des Outils du début des années 1970 à celle du Concept supranodal des années 1990, en passant par les Toiles calcinées des années 1980 : rien que des histoires de cordes nouées et de surfaces brûlées ! «Depuis une trentaine d’années, je me suis inquiété de creuser une relation entre l’énergie fulminante et l’inertie compulsive». Le résultat est là : des alignements de petites formes viriles (parfois rassemblées dans des boîtes à couvercles) et des toiles monumentales suspendues. Des nœuds dont on se demande s’ils retiennent ou s’ils étouffent, et des brûlures évoquant simultanément la purification et la destruction. Quoi de plus paradoxal qu’une corde à nœud, si redoutable dans les mains d’un bourreau, si précieuse dans celles d’un évadé ? Il y a de la Pénélope et de l’Arachné en chacun de nous...

Des nœuds et... des ricochets
Tout l’œuvre de Jaccard est ainsi, virtuose, à la fois très beau pour l’œil et fort dérangeant pour l’esprit. On songe à Twombly, à Rothko, au meilleur de la création occidentale de l’après-Seconde Guerre mondiale. Aux cavaliers de notre Apocalypse également, qui ont remplacé le «point, ligne, plan» moderne, énoncé par Kandinsky, par le «point, ligne, nœud» existentiel de Jaccard. Dans une autre salle de l’exposition, le musée, dont la vocation première concerne les arts décoratifs, présente des objets dessinés par Jaccard pour la table et la décoration. Il parle de «ricochets» de son travail, à propos du séduisant service de Sèvres en porcelaine, des brûle-parfums en bronze ou encore des sulfureuses embrasses en cuir rouge, récemment réalisées par la maison de passementeries Van Lathem, mécène de l’exposition. Si l’inquiétude de Jaccard peut se décliner en style, elle n’en demeure pas moins une qualité.


 Françoise Monnin
03.09.2002