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Marché

Les Kugel mis en orbite

Une cinquantaine de luxueuses sphères terrestres et célestes retracent plus de 1500 ans de compréhension du monde.


Jean Pigeon, Sphère mouvante,
1723, Paris,, 50 cm de diamètre.
© kugel.
PARIS. Si un antiquaire était prédestiné à réunir un ensemble de globes terrestres et célestes, il s’agit bien de la galerie Kugel dont le nom veut dire sphère, en allemand. Voilà maintenant quatre ans qu’Alexis et Nicolas Kugel travaillent à l’organisation de cette exposition thématique qui ouvre ses portes en marge de la Biennale des antiquaires. Elle trouve son origine dans une petite collection héritée de leur père et savamment enrichie de pièces provenant de mains privées, souvent inédites sur le marché. Et pour cause : Alexis Kugel soutient qu’il n’existe pas de réels collectionneurs pour ces objets trop rares et lance le défi d’initier un nouveau marché, parallèle à celui des instruments scientifiques.


Erasmus Habermel, Sphère
armillaire
, 1594, Prague,
39 cm de diamètre.
© Kugel.
La fine fleur des sphères
Pour créer cette émulation, il mise sur l’exceptionnelle qualité de ses objets. Ici, on ne trouve aucun globe imprimé sur papier mais uniquement des pièces précieuses en argent, en bronze doré, en ivoire et même en cristal de roche, de celles qui ont fait la fierté de princes ou de mécènes éclairés. Parmi ces œuvres historiques figurent une horloge offerte à l’empereur Maximilien par le Comte Guillaume IV de Hesse-Kassel, l’une des cinq sphères créées par Jean Pigeon - dont le premier exemplaire fut acquis par Louis XIV pour l’Académie des Sciences - et une pendule destinée au prince de Conti dont le socle est orné, au revers, d’un cadran des phases de la Lune.

Entre esthétique et science
Car la beauté de ces objets aux surfaces finement gravées, soutenus par de puissants atlantes ou formant une coupe fermée (le Globuspokal en argent et vermeil d’Abraham Gessner), ne doit pas faire oublier leur caractère scientifique. Ils composent une histoire de l’astronomie, de l’époque hellénistique au début du XIXe siècle. Ce parcours du géocentrisme de Ptolémée à la révolution copernicienne est ponctué par les réalisations de certains des plus grands noms du genre. On retrouve ainsi la seule sphère armillaire connue d’Erasmus Habermel, le fabricant attitré de l’empereur Rodolphe II, ou le plus célèbre des globes célestes, celui d’Antide Janvier. Cette horloge astronomique, saluée lors de l’Exposition des arts industriels de 1802 comme la plus complexe du monde, nécessita onze années de travail à son créateur qui la réalisa à partir de 1789, en pleine tourmente révolutionnaire.


 Zoé Blumenfeld
18.09.2002