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Marché

Heurs et malheurs de la peinture moderne

Les tableaux de la succession Carré et la première vente de Pierre Bergé & Associés ont rencontré un accueil bien différent.


Jacques Villon, Homme dessinant,
huile sur toile, 116 x 81 cm, 1935,
adjugé 180 000 €, soit six fois
l’estimation haute. © Artcurial
Briest - Poulain Le Fur.
PARIS. Les 9 et 10 décembre derniers étaient annoncés comme deux grandes journées pour le marché parisien de l’art moderne, avec d’un côté la première vente de prestige de Pierre Bergé & Associés et, de l’autre, la succession de la veuve du galeriste Louis Carré, menée par Piasa et Artcurial Briest - Poulain Le Fur. Présentée en grande pompe au Plaza Athénée, la vente de Pierre Bergé & Associés proposait cinquante-cinq lots. Finalement, seuls vingt-quatre d’entre eux ont trouvé acquéreur. Dix des treize œuvres estimées au-delà de 100 000 € sont restées invendues. Parmi elles figurent les vedettes annoncées de la vacation : deux portraits de Fernande Olivier par Van Dongen, la Nature morte à la statuette de Léger ou L’Inondation à Moret sur Loing de Sisley. Maigre consolation, quelques œuvres - signées Montezin, Gleizes ou Goncharova - adjugées autour de 30 000 € ont dépassé leurs estimations.

Résurrection de la modernité française
À l’inverse, la succession Carré a connu un franc succès. Contrairement aux craintes formulées par les esprits chagrins, l’abondance de lots (quatre cent cinquante-huit numéros) n’a pas nui à la vente. Sans doute parce que ces œuvres, proposées sans prix de réserve, ont généralement été acquises il y a plus de 50 ans, directement auprès des artistes. Les trois vacations ont totalisé 19,15 millions €, dépassant ainsi les meilleures estimations. La vedette incontestée de la première session a été Fernand Léger. Le Disque rouge, un tableau cubiste de 1919, a été emporté 1,76 million € par le petit-fils de Louis Carré et actuel directeur de la galerie du même nom, Patrick Bongers. Quant à Marie l’acrobate, adjugée 2,47 millions € à un collectionneur londonien, elle constitue un record français pour l’artiste. Mais la vente a surtout marqué la «résurrection de l’art français des années 1930-1960», pour reprendre les mots de Jean-Louis Picard, qui, avec Francis Briest, tenait le marteau. Parmi les oubliés du marché soudainement resurgis figurent Jacques Villon, Maurice Estève, André Lanskoy, Auguste Herbin et, dans une certaine mesure, Raoul Dufy.


 Zoé Blumenfeld
21.12.2002