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Patrimoine

La nature érotisée à Chaumont

Trente jardins ont été conçus autour du thème périlleux de l’érotisme. Promenade initiatique au pays des sens et des songes...


Jardin "Flou"
© Photo : Muriel Carbonnet
Pour Peter Bellchambers, architecte paysagiste, et Yvonne Van Roeckel, architecte d’intérieur, l’érotisme n’est jamais explicite. «Le projet de Chaumont est venu de l’image d’une danseuse du Crazy Horse qui prenait une douche et dont on ne voyait que l’ombre. C’était très érotique», explique Peter Bellchambers. Dans «Et vice et versa», à la moiteur permanente, un sous-bois tamisé abrite des tontines où l’on peut se réfugier à un, à deux ou à plusieurs : un jardin de toutes les tentations aux plantes grimpantes parfumées et aux fougères luxuriantes qui met les sens en ébullition. Une sculpture de Pascale Poncin, aux formes délicieuses d’une paire de fesses, achève de jeter le trouble. Plus loin, «Le Nid des déesses Mappa» met en scène des gants de caoutchouc roses et gonflés qui, flottant sur une mare envahie de roseaux phalliques, vibrent toutes les huit minutes. Il s’agit là d’une transformation des objets qui révèle leur aspect sensuel et humoristique. Autour de la pièce d’eau, des cucurbitacées ont été plantées, notamment des pieds de concombres du Diable qui explosent à maturation. On est ensuite attiré par «Les pétales du désir». C’est un des plus petits jardins et pourtant il n’y paraît rien. «C’est en raison de la démultiplication de l’espace et des plantes grimpantes comme les ipomées noires», expliquent Eric-Pierre Ménard, paysagiste, et Chantal Dugave, architecte plasticienne.


Jardin d'ivresses
© Photo : Muriel Carbonnet
Sens dessus dessous
«The Dance of the Seven Gardens» est une allégorie de la danse des sept voiles de Salomé, qui ne s’est jamais «dévoilée» et a obtenu ce qu’elle voulait : la tête de saint Jean. Dans un parcours circulaire, les jardins se dévoilent un à un. Plus l’on se rapproche du septième, plus le passage se fait étroit. Le dernier jardin restera impénétrable. «Le jardin Flou» est l’occasion d’un égarement des sens olfactifs (verveine odorante, skimmia japonica…) et visuels. Des vélums virginaux transparents dévorent ses limites, laissant entrevoir un saule tortueux et un chardon boule. Bien d’autres jardins encore retiennent l’attention. «Green Phantasy Landscape», chambre à coucher ondulante ou cabinet intime déluré, est le siège de clématites qui vous caressent à chaque pas. «L’Eloge de la Sieste» invite à se prélasser sur un banc de pelouse tandis que des voix susurrent au creux de l’oreille de doux messages. On découvre bientôt avec stupéfaction, sous un amium et un bambou, une sculpture de Piero Veraldi… au fessier, girond s’il en est !


 Muriel Carbonnet
14.08.2002