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Expositions

Francis Bacon, Étude pour une corrida n°2, 1969, huile sur toile, 197 x 147 cm. Musée des Beaux-arts, Lyon, legs Jacqueline Delubac, 1997. © RMN- Ojéda - Le Mage / ADAGP Paris 2002.


Thomas Grünfeld, Misfit (gnou / cygne), 2001, taxidermie, 180 x 150 x 70 cm. Thomas Grünfeld, Cologne. © ADAGP Paris 2002.


Bêtes d’exposition

À l’occasion du cinquantenaire de sa féria, Nîmes s’interroge sur la place de l’animal dans l’art moderne et contemporain.

NÎMES. « La part de l’autre », tradition locale oblige, débute par une double salle sur la corrida, qui permet de découvrir des œuvres graphiques de Picasso, Masson et Brauner jusqu’alors peu montrées. Dès La Minotauromachie, eau-forte de 1935 de Picasso et Femme et Taureau, encre et lavis sur papier de 1942 de Masson, le ton est donné : la tauromachie reprend les questions éternelles de la mort et l’érotisme. Ce que ne contredit pas l’Étude pour une corrida n°2, une toile peinte par Bacon en 1969, sans doute une de ses œuvres les plus métaphysiques : le matador y est montré comme enchevêtré dans un flot de matière avec son taureau.

L’animal, un autre
Au-delà de la corrida, l’animal constitue également la métaphore de l’autre. Ainsi, dans I like America and America likes me, une vidéo de la célèbre action de Beuys montrée ici dans son intégralité, l’artiste cherche à coexister avec un coyote, dans la galerie René Block à New York. Xavier Veilhan met en scène le rôle perturbateur de l’animal dans un environnement humain : pour Le Palais, une photographie numérique de 1997, il se promène en costume de pingouin dans les couloirs d’un Palais de justice. La figure de l’animal est aussi censée incarner cet autre dans tout ce qu’il peut avoir de fantasmatique : Valie Export promène en laisse Peter Weihel, un autre artiste, tandis que Paul Mc Carthy érige Bear and a rabbit on a rock, une sculpture monumentale en peluche dominant tout le Carré d’Art de Nîmes, qui n’est pas exempte de lubricité infantile. Mais l’animalité est aussi synonyme de peur et d’altération morphologique. Butt to Butt, sculpture de Bruce Nauman, montre des insectes difformes, et Thomas Grünfeld imagine des chien-moutons et autres gnou-cygnes. C’est que, comme dans les Fables de La Fontaine, l’animal est un double et une vision du monde.


 Frédéric Maufras
31.08.2002