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Patrimoine

Maladie verte à Lascaux

Les peintures de la grotte de Lascaux, qui remontent à 17 000 ans, sont à nouveau menacées par des champignons.

PARIS. Le ministre de la Culture et de la Communication Jean-Jacques Aillagon vient de créer un comité scientifique, présidé par Marc Gauthier, inspecteur général de l'archéologie honoraire et expert auprès de la Commission européenne. Siégant à Bordeaux, il aura pour tâche délicate d'éradiquer la «maladie verte» qui menace depuis plusieurs décennies les peintures préhistoriques de la grotte de Lascaux (Périgord). Découvert le 12 septembre 1940, le site avait stupéfié les contemporains par la remarquable conservation des chevaux et de taureaux qui courent sur ses parois. Ce petit miracle avait été rendu possible grâce à la fermeture rapide de la cavité, le porche d'entrée s'étant effondré seulement quelques millénaires après la visite des hommes préhistoriques. L'existence d'une couche d'argile imperméable au-dessus de la cavité avait permis d'éviter les infiltrations d'eau et de garder intactes les peintures. Malheureusement, le propriétaire d'alors réalisa d'importants travaux d'aménagement touristique : il bétonna le sol pour faciliter la progression des visiteurs et installa de grosses lampes.

Maladie verte ou maladie blanche ?
Chaque jour jusqu'en 1963, 2 000 personnes se sont engouffrées dans la petite cavité (150 mètres de long), où les circulations d'air se faisaient difficilement. La chaleur, émanant des lampes et des visiteurs, ainsi que le dioxyde de carbone furent à l'origine de la prolifération d'algues et de champignons sur les parois : c'était la «maladie verte», qui commença à recouvrir les peintures. Plus grave, une réaction chimique en chaîne amena la formation de calcite (carbonate naturel de calcium cristallisé) qui masqua les parois d'une pellicule blanchâtre, dissolvant les pigments préhistoriques. Cette «maladie blanche» est incurable, mais sa progression peut être ralentie. Quant à la «maladie verte», on pensait l'avoir éradiquée en aspergeant les parois avec une solution formolée et en limitant les visites aux seuls chercheurs : il est nécessaire de franchir plusieurs sas de décontamination et de tremper ses chaussures dans la même solution formolée pour supprimer les spores et les pollens. Cela n'a pas suffi. Comme un cauchemar, la «maladie verte» est revenue. Un nouveau couple champignon-bactérie s'est manifesté, pour le moment sur le sol et les banquettes latérales. Comment l'éradiquer avant qu'il ne développe sur les parois ?


 Romain Pigeaud
21.10.2002