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Musées

Le souffle du 11 septembre

L’effet des attentats new-yorkais semble avoir moins d’effet qu’on ne le craignait sur l’évolution des primes.


Les baigneuses de Cézanne
© Gérard Rondeau
« Avec le 11 septembre, on a réalisé qu’un sinistre de 50 milliards $ pouvait survenir. À titre significatif, une simulation faite avant l’attentat imaginait deux avions s’effondrant sur une ville moyenne. Que peut-on imaginer maintenant ? Il y a aujourd’hui une concentration de risques nouvelle. Il va sans doute y avoir une nouvelle augmentation des primes, mais on ne peut pas la prévoir.» Pour Alain Gilbert, le directeur d’Axa Art, qui assure 80% des galeries parisiennes, les perspectives ne sont pas forcément roses pour les professionnels, qui doivent déjà faire face à d’autres risques que les particuliers. Leurs garanties se doivent d’être plus étendues : pas tant pour se protéger des risques du terrorisme que pour couvrir le transport ou les séjours chez les tiers, les restaurateurs par exemple. Dans le domaine de l’art comme ailleurs, c’est surtout la météo qui semble pourrie… Depuis plusieurs années, les plus gros sinistres enregistrés pour les marchands sont liés aux orages et aux crues de la Seine, qui provoquent des dégâts des eaux, notamment dans les galeries de Saint-Germain-des-Prés. Destinés au commerce, les objets exposés en galerie n’admettent pas les lézardes qui pourraient être tolérées dans un musée…


L'expert © Gérard Rondeau
Grosse prime pour tête d’affiche
Qu’en est-il exactement de l’effet 11 septembre ? Les prix ont-ils connu une croissance brutale ? Lors de l’effondrement des tours du World Trade Center, l’équivalent de 100 millions $ d’œuvres d’art a été détruit. On a immédiatement craint des conséquences lourdes sur l’évolution des primes d’assurance pour les expositions publiques. Avec un inévitable corollaire : restreindre le mouvement des œuvres devant un transport aérien jugé plus dangereux que dans le passé. Cependant, malgré les prévisions alarmistes, les primes d’assurance n’ont enregistré qu’une hausse de 15 à 20% pour les professionnels. En France, à la suite de l’attentat, un pool baptisé GAREAT (Gestion de l’assurance et de la réassurance des risques d’attentat et actes de terrorisme) a été créé en décembre 2001. Il est chargé de définir les conditions d’assurance des dommages aux biens résultant d’actes de terrorisme. C’est un domaine dans lequel la France s’est placée en tête de peloton. Depuis 1986, la couverture de ce type de risque y est obligatoire alors qu’elle est inexistante aux États-Unis. Dans les faits, le calme relatif sur l’évolution des primes semble se concrétiser. L’exposition «Matisse-Picasso», le grand show de l’année, servait d’épreuve du feu. La facture s’est élevée à moins d’1 million €, soit légèrement moins que pour une autre exposition mastodonte comme celle dédiée à Cézanne en 1995. Comment sont calculées les primes ? Elles sont fonction des artistes et des pays d’où proviennent les œuvres prêtées. Lorsque ces derniers ne sont pas des étoiles de première grandeur, lorsque les pièces ne sont pas particulièrement fragiles et qu’elles viennent pour l’essentiel de France, le chiffre peut être fort modeste. Ainsi, l’assurance pour l’exposition «Méditerranée», qui s’est tenue au Grand Palais à l’automne 2000, n’a coûté que 0,19 million €. Elle réunissait certes quelques Courbet, Cézanne ou Maillol, mais surtout un fort contingent d’artistes à la cote moins affirmée comme Cross, Signorini ou Sorolla. En peinture comme dans le show-business, ce sont les têtes d’affiche qui coûtent. Mais elles peuvent rapporter gros…


 Roxana Azimi
06.11.2002