Home > Le Quotidien des Arts > Agnès B. et les tagueurs

Expositions

Moze, Camion d'Agnès B
© Galerie Agnès B


Agnès B. et les tagueurs

Conduits par Moze, le roi des graffeurs de Belleville, 18 de ses condisciples ont investi la galerie du Jour.

Un vernissage qui a failli être aussi tonitruant qu’une soirée de hip hop dans une fonderie désaffecté de Gennevilliers ? Cela se passait vendredi dernier dans le grand espace de 400 m2 de la galerie du Jour d’Agnès B, qui s ‘étend bien au delà de la vitrine/ librairie qui s’ouvre au 44, rue Quincampoix. Tout ce qui compte de graffeurs, tagueurs, rappeurs et leurs admirateurs se bousculaient pour admirer les 18 meilleurs artistes du milieu « Graff » sélectionnés par Agnès B et faire la fête sur la musique de Bumcello. Dommage, pour cette partie du programme, que les baffles aient été mises en sourdine assez tôt. Mais rien n’a empêché le vernissage de se poursuivre bon train dans une galerie investie de grandes fresques multicolores et flashantes, relayées dans les sous-sols par des vidéos hards et poétiques.

Tous les seigneurs du Graff sont là : André, Aone, Badbc (Jay, Ash and Skki), Fafi, Futura, Jack2, Jonone, l'Atlas, Mambo, Mist, Moze, Os Gemenos, O’Clock, Psyckose, Space Invader, Zevs. Et c’est d’ailleurs assez incongru de les voir au grand jour en quête de respectabilité et de reconnaissance artistique alors que leur démarche les conduit plutôt à œuvrer dans les nuits sombres, à redonner en toute illégalité quelque humanité à ces longues parois sans fin de briques ternes ou de béton, à la lénifiante monotonie. Ainsi Psychose No Limit est un graffeur de la première heure, il a commencé en 1984 et alterne grands formats sur les murs de la ville et toiles exposées dans les lieux urbains atypiques. Il a exposé à New York, à Belleville et met actuellement sur pied avec la ville de Bagnolet un concept d’expositions tournantes sur les murs de la ville.

Moze animait l’atelier « live » et réalisait au beau milieu de ses bombes à couleurs et du public un grand format de 2x3m.C’est un sorte de porte-parole du milieu. Il aime à raconter son histoire et justifier un démarche bien souvent incomprise du citoyen urbain qui paye ses impôts. Car c’est lui qui a graffé si majestueusement le camion d’Agnès B. Moze s’est mis au graffiti dans les années 1980 en allant « mater » Beat Street 84 au Pathé de la place de Clichy. C’est en revenant de ce spectacle qu’il a fait son premier tag sur le mur du foyer. Après avoir signé Bomb, puis Master puis Sab, il a trouvé son tag actuel Moze alors qu’il « galérait » avec les DHK du côté de Stalingrad et qu’une « nana », Sabrina lui a dit « change ton blaze »… Il a beaucoup tagué dans le métro mais s’est spécialisé avec son « crew » dans les camions à Belleville : « Le simple fait que le message puisse circuler dans Paris, que mes dédicaces se diffusent le mieux possible ».


 Pierre-Antoine Baubion
03.10.2001