Home > Le Quotidien des Arts > Szurek face à Szurek

Expositions

Szurek face à Szurek

Depuis treize ans, chaque apparition du dessinateur sur la scène parisienne provoque l’engouement. Explication ?


© Françoise Monnin
PARIS. Hormis Kantor et Opalka, quels sont les artistes polonais, depuis un demi-siècle, auxquels l’Occident daigne s’intéresser ? Piotr Szurek ! Le phénomène demeure certes essentiellement parisien. Il assure une partie non négligeable du chiffre d’affaires de la galerie Koralewski, et ce depuis la première exposition qu’elle a consacrée à l’artiste, en 1990. Dès lors, les autoportraits en format géant du jeune professeur (il est né en 1958), de l’école nationale supérieure des arts plastiques de Poznan, ont fasciné les collectionneurs. Et les critiques d’art ! Chacun y est allé de sa référence à Rembrandt ou à Bacon, voire à la Bible, pour mieux célébrer le jeune maître.

Dans un carreau de fenêtre
Szurek dessine et grave cependant toujours la même tête - la sienne - en lui donnant une allure expressionniste, à l’aide d’effets de griffes et de taches, extrêmement séduisants. Splendides allégories du triomphe du mental sur les accidents ! «C’est parfait, absolument parfait», s’exclamait à nouveau un visiteur, lors du vernissage de l’actuelle exposition, inaugurée le 10 octobre. Trop parfait ? Depuis treize ans, le regard fixe de tous ces portraits dialoguent si merveilleusement, avec les effets de matière et les réseaux de lignes qui le rehaussent, qu’on ne peut s’empêcher d’y voir un «système» Szurek, tels que ceux qu’élaborèrent en leur temps Mathieu ou Moretti. Szurek a du métier. La justesse de son trait est diabolique. Difficile, par conséquent, pour l’artiste, de ne pas s’en contenter. On aurait toutefois envie de lui chuchoter à l’oreille, la plus grande, celle dont on connaît désormais les plus secrets replis, qu’avec une même aisance, on aimerait le voir s’attaquer à un autre monde que celui de son miroir. «La vie tient dans un carreau de fenêtre», disait Braque. À condition de ne pas regarder toujours dans la même direction.


 Françoise Monnin
08.11.2002