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Expositions

Archéologie de l’imaginaire

Le Centre canadien d’architecture aborde l’œuvre des Suisses Herzog et de Meuron de manière inattendue.


Vue de l’installation, galerie 3.
© Photo Michel Legendre, Centre
Canadien d’Architecture/Canadian
Centre for Architecture, Montréal.
MONTRÉAL. Herzog et de Meuron ont recu le Pritzker Price en 2001 (plus haute distinction dans le domaine) pour la réalisation de la Tate Modern à Londres, mais aussi pour l’ensemble de leur œuvre. Il ne manquait qu’une exposition d’envergure pour couronner leur travail. Le Centre Pompidou l’avait initiée sur la mezzanine nord en 1995, sur une scénographie de verres et fluorescences de l’artiste Remy Zaug. Sept ans plus tard (âge de raison ?), c’est dans l’enceinte du Centre canadien d’architecture (CCA) que le parcours de ces architectes est exposé. Ce n’est pas une exposition d’architecture comme on l’entend dans le sens traditionnel du terme, avec des panneaux regroupant plans, coupes, photographies, imagerie virtuelle qui retranscrivent l’édifice. Par définition, la véritable exposition d’architecture est la visite des lieux et, plutôt que d’en montrer des réductions sur papier, Phillip Ursprung, commissaire de l’exposition, a proposé à Phillys Lambert, présidente et fondatrice du CCA, un projet sous une forme tout a fait renouvelée, qui fait référence aux cabinets de curiosités d’antan. Avec les architectes et les conservateurs du CCA, il a collecté des objets d’étude, «rebuts d’agence», selon les termes de Jacques Herzog, auxquels il a juxtaposé des pièces de la collection gigantesque du CCA et d’autres musées nord-américains. On y retrouve ainsi des jouets architecturaux, un reliquaire du XIIIe siècle, une reproduction des frises du Parthénon par John Henning datant du XIXe siècle, des fossiles, des pierres de lettrés chinois confrontés à des maquettes d’agence, fragments de façade et autres échantillons de matériaux sortis des ateliers des architectes.

Art et architecture
Les concepteurs du siège social de Prada à New York, de la bibliothèque d’Eberswald près de Berlin, du New Young Museum à San Francisco ou du Walker Art Center de Minneapolis montrent pour la première fois les outils de leur processus de conception, reliés à des œuvres d’art qui alimentent ou renvoient à leur démarche. De Karl Blossfeldt à Don Judd, en passant par Jeff Wall, le choix des pièces exprime bien le lien étroit entre art et architecture. Une sorte de mise à plat de l’esprit créatif de Herzog et de Meuron, dans une scénographie qui renforce les traits de ces fouilles archéologiques, socles bas sur lesquels sont disposées les pièces, muséographiques ou d’atelier, simplement protégées par un plexiglas courbe qui dynamise la rigueur du dispositif.


 Rafaël Magrou
26.11.2002