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© Artcurial - Briest - Poulain - Le Fur.

Rémi Le Fur, «Je m’amusais en “faisant mon Cornette”»

Rémi Le Fur revient sur la «malédiction» qui aurait pu l’empêcher de devenir commissaire-priseur.

À l’époque où j’étais stagiaire chez Cornette de Saint-Cyr, au début des années 1980, j’étais resté seul après une vente avec le clerc au procès verbal, Elisabeth Monteil, une figure de l’hôtel Drouot. Je m’amusais en «faisant mon Cornette», faisant semblant de vendre, quand est arrivé le commissaire-priseur qui nous succédait dans la salle. Il m’a regardé et m’a dit «Vous ne serez jamais commissaire-priseur». Je me suis mis à blêmir. Il avait pointé son doigt vers moi comme si c’était une malédiction… Elisabeth Monteil a essayé de me rassurer mais cela m’a vraiment traumatisé. Il pouvait être celui qui me ferait passer l’examen, il pouvait me mettre des bâtons dans les roues…

Les hasards de la vie…
En 1987, je suis allé prêter serment au Palais de justice en grande pompe, avec robe noire et col blanc. Nous avons déjeuné avec Joël Millon, le président de la compagnie des commissaires-priseurs de Paris, Hervé Poulain, mon nouvel associé, et la présidente de Drouot. À la fin du repas, nous sommes tous partis pour Drouot. Je pensais que nous nous séparerions là. Mais, une fois entrés, Joël Millon m’a dit : «Tu connais la coutume, je choisis une salle pour ton premier coup de marteau». Je n’en avais jamais entendu parler sinon je me serais préparé, je me serais renseigné… C’était un usage plus ou moins relâché, je suppose. J’avais les jambes en coton. Nous sommes entrés dans la salle 6. C’était au beau milieu de la vente, car il devait bien être 15 h 30. Après qu’on lui a expliqué de quoi il s’agissait, le commissaire-priseur m’a donné son marteau avec un sourire pincé. Qui était-ce ? Celui-là même qui m’avait bouleversé cinq ans auparavant.


 Zoé Blumenfeld
22.01.2003