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Marché

Il faut sauver Mallet-Stevens

Le cabinet Camard présente un exceptionnel ensemble de mobilier dessiné pour la villa Cavroix de Lille. Pourra-t-il y être réinstallé ?


Robert Mallet-Stevens Coiffeuse en
placage de sycomore et lame de métal
poli
, 1932. Est. : 100 000 à 200 000 €.
Juin est en passe de devenir un mois-clé pour les ventes d’arts décoratifs, en raison notamment du nouveau salon « XXe siècle », qui draine un public de collectionneurs. Après une première passe d’armes le 6 juin - avec de belles créations des verriers italiens et des pièces de facture scandinave et française comme ce lot de sept chaises Nagasaki de Mathieu Mategot - la vente de prestige se tient le 17 juin. On y verra essentiellement du mobilier de l’entre-deux-guerres, dont une série de luminaires en albâtre de Pierre Chareau (à partir de 15 000 €) et une table lumineuse en verre de Jean Perzel (18 000 €). De Jacques-Emile Ruhlmann, on retiendra de nombreuses pièces en placage de bois rares (violette ou macassar), notamment un chiffonnier et un secrétaire destinés à une loge d’actrice et présentés au Salon des artistes décorateurs de 1930. Mais les lots les plus attendus concernent le mobilier de Robert Mallet-Stevens pour la villa qu’il construisit à Croix, près de Lille, en 1934. « Le galeriste Karsten Greve a eu l’opportunité, il y a plusieurs années, de racheter de nombreux meubles de la villa Cavroix pour son appartement parisien, qui se trouvait être lui aussi dessiné par Mallet-Stevens » indique Jean-Marcel Camard. Un heureux hasard a ainsi permis de mettre à l’abri, dans un lieu unique, une grande partie de ces joyaux des arts décoratifs, de la table de salle à manger en placage de zingana (100 000 €) jusqu’au porte-manteau (12 000 €) ou aux lampadaires de parquet (15 000 €). La question déjà soulevée lors de la vente Breton se pose à nouveau, lancinante : cet ensemble significatif pourra-t-il rester en l’état ? Cela serait d’autant plus souhaitable que la restauration de la villa, après des décennies d’incurie, vient d’être lancée. Cependant, les cotes atteintes par ce genre de pièces - à la récente vente Lagerfeld chez Sotheby’s, on a vu une paire de tables Diabolo de Jean-Michel Franck friser les 400 000 € et une console d’Eileen Gray dépasser les 300 000 € - risquent fort de décourager toute velléité des institutions…


 Olivier Reneau
17.06.2003