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Marché

Fou, fou, fou de Simenon

Les premières éditions, manuscrits et tapuscrits proposés par Sotheby’s invitent à une plongée en profondeur dans l’univers de Simenon.


Georges simenon, Le Nègre,
1948, édition originale, Paris,
estimé à 800 / 1 200 €
PARIS. Ni commissaire de police ni conservateur à la Bibliothèque nationale. Le mystérieux J.-M.B, qui met en vente une collection amassée en quelques années est un simple passionné de l’auteur belge. Il est a priori difficile de faire le tour d’une œuvre qui compte quelque cinq cents titres, dont la moitié sont des Maigret. L’ensemble réussit néanmoins à donner une image remarquablement complète de cette production, du tout premier Au pont des arches, écrit à 16 ans et publié sous le pseudonyme de Sim (1921, 1000 €) jusqu’à Lettre à ma mère, sorti en 1974 aux Presses de la Cité (400 €). Y figurent le premier Maigret paru chez Fayard, après le refus de cinq éditeurs - Pietr le Letton (1931, 400 €) -, le premier Maigret adapté au cinéma - Le Chien jaune (1931, 800 €) -, le premier Maigret publié chez Gallimard, grâce aux bons offices d’André Gide qui était un passionné de la série - Le Locataire (1934, 1000 €) ou encore le premier publié aux Presses de la Cité - Trois chambres à Manhattan (1946, 500 €), l’éditeur auquel il resterait fidèle jusqu’à sa mort. Mais la collection est surtout remarquable par ses manuscrits et tapuscrits. «Maigret avait une technique parfaitement rodée, explique Anne Heilbronn, l’un des experts de la vente. Lorsque des idées lui venaient, il les notait sur une des enveloppes jaunes qu’il emportait toujours avec lui. Pour écrire, il s’isolait pendant une semaine et écrivait chaque matin un chapitre. Les Maigret étaient tapés à la machine, les autres romans écrits à la main.» Le lot 103, consacré à La Mort de Belle, un roman écrit en 1951 durant sa résidence américaine dans le Connecticut est le plus complet. Il contient la fameuse enveloppe jaune, le manuscrit autographe au crayon et le tapuscrit. Il est estimé entre 100 000 et 150 000 €. Parmi les curiosités croustillantes, on notera les deux éditions de Pedigree, ouvrage à teneur autobiographique : la version non expurgée de 1948 et la version « allégée » de 1952, qui appartint à son ami Gilbert Sigaux (1500 €). Ou encore cette curieuse correspondance d’Hyacinthe Dans, meurtrier de sa mère et de sa maîtresse, « prisonnier « préféré » de la Belgique, après avoir été éditeur d’un journal de chantage auquel collabora Simenon. Tous les ouvrages sont présentés dans des emboîtages originaux commandés par le collectionneur à Thérèse Treille.


 Rafael Pic
24.06.2003