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Expositions

Philippe Halsman, Audrey Hepburn, 1954
© Philippe / Yvonne Halsman, Magnum Photos


Hans Namuth, Andy Warhol, 1981
© Namuth Estate


Halsman-Namuth, portraits croisés

L'Hôtel de Sully met en regard deux photographes européens aux itinéraires parallèles.

L’Hôtel de Sully à Paris propose une agréable confrontation de deux portraitistes qui ont en commun, outre le fait d’être sensiblement de la même génération, celui d’avoir suivi un itinéraire qui les mène au même moment de l’Est à l’Ouest : ils quittent tous les deux en 1940, et pour les mêmes raisons, le continent européen afin de rejoindre les États-Unis. Auparavant, Paris aura été pour eux un lieu d’engagement dans le métier de la photographie. Philippe Halsman signe ainsi, dès 1933, un intéressant portrait d’André Malraux, suivi de celui d’André Gide en 1934. Hans Namuth couvre en 1936 à Barcelone, pour l’excellent magazine « Vu » de Lucien Vogel, une manifestation sportive qui va l’amener à assister aux débuts de la Guerre Civile. Ce n’est que plus tard, et aux États-Unis, qu’il s’engagera dans le portrait, avec en 1950 un travail de plusieurs mois sur le peintre Jackson Pollock auquel son nom est désormais étroitement associé.

À l’Hôtel de Sully, la part belle est faite à Halsman, à ses images flatteuses, voire spectaculaires, convoquant de nombreuses personnalités du cinéma hollywoodien des années cinquante. La “Jumpology” est à l’honneur : Halsman a cette curieuse idée de demander à certains sujets dont il fait le portrait de sauter en l’air juste au moment de la prise de vue ; demande d’autant plus inattendue qu’elle s’adresse souvent à des personnes respectables, que l’on imagine très sérieuses, telles le vice-président Nixon, en 1955, ou le duc et la duchesse de Windsor, en 1956. En regard de cet ensemble ludique et léger - il y a quand même des portraits plus calmes et plus posés -, l’univers de Hans Namuth apparaît comme très différent, tant dans sa forme que son contenu. Ses images mal servies par les trois petites salles inconfortables de l’Hôtel de Sully, dessinent néanmoins un parcours passionnant au milieu des artistes qui ont fait la grande peinture américaine de l’après-guerre. Les plus importants d’entre eux sont au rendez-vous et dans ces portraits, les plans sont suffisamment larges pour permettre une découverte des ateliers autant qu’une rencontre avec des visages. Et la couleur, peu connue chez Namuth, est surtout intéressante ici d’un point de vue documentaire. De cette confrontation, il en ressort que le travail d’Halsman apparaît comme très conforme à ce que l’on pouvait imaginer, et l’on fait peu de découvertes, excepté peut-être en ce qui concerne les premiers portraits. Quant à Namuth, la dimension et la cohérence de son travail de portraitiste dans le monde de l’art américain s’imposeront à beaucoup de visiteurs.


 Gabriel Bauret
09.10.2001