Les vitupérations de Louis Ferdinand Céline

Le commissaire-priseur Claude Aguttes dirige la vente d’affiches, de papiers anciens et d’autographes, dont une correspondance inédite de Louis Ferdinand Céline à son ami d’avant-guerre AL…. L’expert Mario Mordente nous présente ces documents.

De quelles lettres s’agit-il ?
Mario Mordente. Il s’agit de soixante-quinze lettres autographes signées, tirées d’une correspondance de Louis Ferdinand Céline avec un de ses amis de la Butte. En tout, ce sont 270 pages pour la plupart in-folio ou grand in-quarto, écrites au recto et au verso. Ces lettres étaient en possession d’une famille qui a désiré garder l’anonymat, mais les connaisseurs de Céline peuvent facilement le deviner. Elles datent des années 1947 à 1955, pendant lesquelles Céline s’était réfugié au Danemark avec son épouse Lucette, pour échapper au mandat d’arrêt lancé contre lui par la Cour de Justice de la Seine pour collaboration. Son ami s’était chargé de sa défense, et beaucoup de lettres concernent donc la situation politique de l’époque et la position de l’écrivain au sein de celle-ci. Conformément au style de l’écrivain, ce sont des lettres très variées, allant du ton amical au pamphlet, de la défense et de la quête de renseignements, jusqu’à la critique violente. Il dénonce dans le langage qui lui est propre les autres écrivains collaborateurs circulant librement en France au même moment. Son style est nerveux, vitupérateur, féroce même.

Qu’attendez-vous de cette vente ?
Mario Mordente. Louis Ferdinand Céline est un grand écrivain, auquel nous devons une véritable révolution du style littéraire. Il y a beaucoup d’amateurs et de connaisseurs de son œuvre qui sont intéressés par ces lettres. Nous pouvons donc prévoir que les manuscrits seront certainement vendus plus cher que leur estimation, dont la plus élevée s’élève à 400 000 / 500 000 francs pour les 75 lettres en question.

Déjà, deux ventes de manuscrits de Céline avaient remporté un grand succès cette année. Une lettre autographe signée, estimée à 4 000 / 5 000 FF, a été vendue le 21 mars dernier par l’étude Piasa pour un montant de 13 000 FF, tandis que le manuscrit autographe inconnu jusqu’à ce jour du premier roman de l'écrivain, « Voyage au bout de la nuit » publié en 1932 et estimé à 5 000 000 FF, était parti pour 11 000 000 FF lors d’une enchère organisée par la même étude. L’auteur de ces mots : « …Les injures continuent à pleuvoir…Guy de la Charbonnière jeune sale petit con hystérique ivrogne inepte très mal vu heureusement à Copenhague ancien employé de Vichy… »... (Copenhague, Rigshospital, 12 mars 1947) serait-il l’objet d’un phénomène de mode ?