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La longue marche de l'internet culturel

L'étude du cabinet Ernst & Young prouve que le monde des arts plastiques n'est pas encore tout à fait convaincu de l'importance d'une diffusion par internet.


culture.fr
Comme chaque année, l'étude Ernst & Young dresse un portrait-robot du paysage internet hexagonal. Un échantillon de 420 acteurs culturels, passé au crible de multiples critères, permet de tirer des conclusions édifiantes. La première, c'est qu'internet est désormais ancré dans les habitudes. Il s'agit même d'une véritable explosion : 21,6 millions d'habitants avaient un accès internet en octobre 2003 contre 11,9 millions en mai 2001. Un progrès considérable qui ne met pourtant pas la France dans les nations leaders. Avec des populations semblables, l'Italie comptait à la même date 25,3 millions de connectés et la Grande-Bretagne plus de 30 millions. Mais la tendance est positive, surout si l'on remarque que les jeunes générations sont formées tôt : 78% des 12-18 ans utilisent l'informatique à l'école. On s'étonne donc de la persistance de certains discours qui ne voient dans internet qu'un passe-temps ou un «joujou». C'est au contraire devenu un véritable outil de travail et de diffusion. Et, pour une fois, les administrations montrent l'exemple, comme on a pu le voir avec le projet du Ministère de la Culture. Le site récemment lancé (culture.fr) est original en termes de charte graphique et de contenu. Sa fréquentation est satisfaisante (plus de 300 000 visiteurs uniques et environ 3 millions de pages vues en décembre 2003) même si le faible recours des internautes à certaines fonctions - l'accès aux informations par la clé «Régions» par exemple - constitue une déception.


lesiteducube.com
Musée cherche locataires
Dans le monde culturel, cependant, la crise de 2000-2001, après l'exaltation démesurée des années précédentes, a laissé des traces. Mais ce n'est pas forcément un mal. Des choix sages ont parfois été faits. Ainsi, au lieu de construire coûte que coûte un propre site internet à la rentabilité et à la fréquentation incertaines, ceux qui préfèrent faire «héberger» leurs pages sont en augmentation, de 7 à 11%. Ce phénomène est particulièrement notable dans la sous-catégorie des musées puisque le pourcentage s'y élève à 22% : on apparaît en général sur le site de la communauté territoriale intéressée. Si le site du Louvre (louvre.fr) est un modèle reconnu, qui reçoit chaque année autant de visiteurs que le musée lui-même (plus de 6 millions) et s'appuie sur la numérisation massive en cours, d'autres musées ont parfois du mal à impliquer leurs équipes et à définir un projet éditorial cohérent.


artasie.com
Maigre création en ligne
Parmi les huit catégories définies (musique, administration générale, théâtre-danse, livre, cinéma, architecture-patrimoine, musées, arts plastiques-marché de l'art), le véritable secteur sinistré est le dernier. La part d'acteurs possédant un site propre n'y est que de 74%. Et les services fournis sont souvent très sommaires. Les galeries vont rarement plus loin que la mise en ligne d'un communiqué de presse et de quelques images. Elles négligent à la fois la création en ligne - le Cube à Issy-les-Moulineaux (lesiteducube.com) serait un exemple à suivre en la matière - et la mise à disposition d'archives complètes sur les expositions passées, qui pourraient être un bon outil de promotion des artistes. Du côté des commissaires-priseurs, la présentation des catalogues de ventes en format PDF est loin d'être la règle et il faut parfois attendre beaucoup plus d'un jour pour voir apparaître les résultats. Quant aux antiquaires, rares sont ceux qui proposent, à l'image de Jacques Barrère (artasie.com), une expertise en ligne. On se consolera en se disant que cette frilosité ambiante sera bien vaincue un jour. Un indice le laisse penser : le taux d'actualisation des informations s'améliore. Les sites qui tiennent à jour leurs informations sur les trois derniers mois sont désormais 63% contre 54% l'an dernier.


 Rafael Pic
15.01.2004