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Expositions

Le mammouth va engraisser le Muséum

Le pachyderme préhistorique, disparu il y a 4000 ans, fait l'objet d'une longue exposition, promise au succès public.


Représentation du mammouth
au XIXe siècle par L. Figuier,
La terre avant le déluge, 1863,
MNHN.
PARIS. A 60 ans, ses dernières dents étaient usées. Incapable de s'alimenter, il était condamné à mort. Au sous-sol de la Grande Galerie de l'Evolution, dans une semi-pénombre, on apprend cela et beaucoup plus sur le mammouth. Frère en popularité du dinosaure, il a disparu bien plus tard. Alors que l'Egypte était en pleine splendeur pharaonique, quelques individus laineux vivaient encore sur l'île de Wrangel, au large de la Sibérie. Le propos est ici largement scientifique : on apprend que le mammouth servait à produire de la graisse pour les lampes, des racloirs et des enclumes, qu'il consommait 180 kg de nourriture par jour. On voit ses os colossaux que leur découvreur, au début du XVIIe siècle, pensait être ceux du roi des Cimbres ! Pièces à conviction placées dans un grand bocal à l'entrée, voici aussi un cœur et un pénis de belles dimensions que les glaces nous ont parfaitement conservés. Un squelette s'élève au milieu de l'itinéraire, celui du mammouth de Vollossovitch, découvert en 1908. C'est une vraie pièce de musée : il a été offert en 1912 à la France par le comte de Stenbock-Fermor, le financier de l'exposition, quelques mois seulement avant que la législation russe interdise définitivement ce genre d'exportation.


Vénus de Lespugue, statuette
féminine (14,7 cm) en ivoire de
mammouth, (Haute-Garonne)
Photo D. Ponsard, MNHN.
Construisez votre hutte
Des animations ludiques - enfilez votre bras dans une trompe pour apprendre comment elle fonctionne ou reproduisez le mouvement de la mastication - se présentent en grand nombre. Fort heureusement, le volet artistique n'est pas négligé. L'un des points forts de l'exposition est une copie grandeur nature de la hutte de Mizyn en Pologne, dont l'ossature est formée de près de trois cents os et défenses, agrégés par du lœss et des peaux. Sur les écrans tactiles, les plus jeunes sont les plus brillants à l'heure de reconstituer cette ancienne maison. Ou comment l'amour pour les mammouths conduit à la faculté d'architecture… Une autre utilisation convaincante des techniques actuelles est fournie par un curieux espace de projection où il faut lever les yeux. Les peintures de la grotte de Rouffignac, en Dordogne, la plus riche en représentations de mammouths, font la ronde au plafond.

Minuscules Vénus
Soigneusement mises à l'abri derrière leurs vitres, les minuscules statuettes sculptées dans les os ou les défenses sont peut-être les pièces les plus fascinantes. Les plus grandes collections ont prêté leurs trésors : l'Ermitage, les musées de Brno, de Kiev et de Cracovie, l'université de Tübingen. Il y a le boomerang de Cracovie et, surtout, le cheval de Vögelherd, parfaitement dessiné. En le voyant si petit, mesure-t-on son importance ? C'est la plus ancienne sculpture connue dans le monde ! Juste à côté, la statuette à tête de lion est la plus grande sculpture que nous connaissons de l'époque paléolithique. Suivent la célèbre Vénus de Lespugue, les ivoires de Gagarino ou la Vénus impudique, ainsi nommée tant les traits de sa féminité sont exagérés. Merci au mammouth, qui fut, à son corps défendant, un ardent promoteur de l'art contemporain…


 Rafael Pic
19.03.2004