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Marché

Les antiquaires jouent l'éclectisme

Aux Tuileries, le huitième Pavillon des antiquaires ménage des rencontres inattendues entre mobilier classique, marbres de Botero et luminaires «seventies».


Table mécanique en placage
de bois de rose, amarante et
bois polychromes, marquetée
de fleurs et de feuillages.
Epoque Louis XV (1735-1774).
Chez Patrick Perrin.
PARIS. On sait désormais que le Pavillon des antiquaires, dans sa version automnale, sera décalé de deux mois, à la fin novembre, pour coïncider avec le début des grandes ventes. Le Pavillon de printemps sera donc le seul à bénéficier du climat clément souhaitable sous les grandes tentes blanches en bordure de la rue de Rivoli. En principe… car ce 27 mars, jour d'inauguration, faisait plutôt penser à une fraîche journée d'hiver. A l'intérieur, sous les zincs du décorateur Francis Arsène, les exposants tentent de brouiller l'association d'idées «Pavillon des antiquaires = mobilier XVIIIe siècle». On y a rarement vu autant de créations récentes. Hopkins-Custot expose des petits marbres de Botero, le champion de la «surcharge pondérale». A la galerie Flore, sous les rayons lancés par une boule-miroir de discothèque, les cadres rococo en coquillages sont remplacés par des lustres de Verner Panton et même - où s'arrêtera-t-on ? - par deux fragments du Concorde. Désossé, l'avion mythique a accédé au statut d'œuvre d'art.


Fernando Botero, Taureau, marbre.
Chez Hopkins Custot.
Joséphine contre Tamara
Dans une mise en scène plutôt dépouillée, ponctuée de bacs de tulipes, quelques décors sortent du lot. C'est le cas de celui d'Olivier Chenel, qui vient d'ailleurs de recevoir le nouveau prix du Pavillon attribué au meilleur stand. Sur un parquet craquant, des buffets juxtaposent de vieilles éditions de Quevedo (qui ne sont pas à vendre !) et des bustes romains (à partir de 10 000 euros). Laurent Herschritt, fidèle à ses habitudes, présente ses tirages anciens dans un cabinet tout de noir tendu. On y voit de la science et de l'industrie : Duchenne de Boulogne excitant les grands zygomatiques de ses cobayes par l'électricité (7000 euros), les chantiers navals de Preston, les images de la Lune prises par les frères Henry, opticiens, à l'observatoire de Paris en 1862 (12 000 euros pièce), qui feront plus tard une carte cosmique comprenant 2326 étoiles. Mais le stand le plus original est à notre goût celui de la galerie Epoca, qui reproduit l'ambiance des cabinets de curiosités, sous des lumières colorées. Un poisson-crocodile naturalisé dans les années trente y joue la vedette (18 000 euros). Si l'on veut dépenser plus, les occasions ne manquent pas. Chez Boulakia, une composition de Manolo Valdés en toile de jute, réinterprétation d'un portrait par Matisse de son épouse, est une pièce spectaculaire, colorée et de grandes dimensions (2,30 m). Elle est proposée à 120 000 euros. Chez Sophie Scheidecker, on voit un Basquiat inattendu car très posé, très sobre dans les couleurs et les formes : JD Card est à 850 000 euros. Chez Barry Friedman, à l'entrée du salon, un beau Tamara de Lempicka attirera certainement l'intérêt, quelques mois avant la grande rétrospective que la Royal Academy de Londres va dédier à l'égérie de l'Art déco. Plus que le Lempicka, c'est une curieuse sculpture en coton d'organdi, signée Joséphine, représentant, dans une cage de verre, un motard barbu au milieu d'une végétation luxuriante (35 000 euros), qui attire les regards. Que chacun ait son quart d'heure de célébrité…


 Rafael Pic
27.03.2004