La céramique Zsolnay aux frontières de l’Art Nouveau

Pourquoi ce thème ? Cette exposition nous fait-elle découvrir un autre versant de l’Art Nouveau ?
François Parmentier. Cette manifestation doit être perçue dans le cadre de l’année culturelle de la Hongrie. Après l’anniversaire du style 1900, l’an dernier, qui nous a familiarisés avec les grands acteurs de l’Ecole de Nancy, nous souhaitions mettre en avant les acteurs secondaires, tout aussi importants à nos yeux. On peut déplorer que la manufacture Zsolnay soit restée dans l’ombre de la grande tradition française de la céramique. Fondée en 1853 par Miklos Zsolnay à Pécs, la manufacture remporte de grands succès aux Expositions universelles de Vienne et de Paris entre 1874 et 1900. Le début du 20e siècle se matérialise par des commandes internationales et la diffusion de sa notoriété dans l’empire austro-hongrois.

L’exposition fait-elle le point sur toute la production de la manufacture depuis 1853 ?
François Parmentier. Les 68 pièces présentées, dont 10 dessins préparatoires, illustrent la diversité des formes et des techniques utilisées de 1890 à 1914 par la manufacture. Prêtées par le musée de Pécs, ces œuvres nous livrent les différents aspects de cette rencontre entre les courants artistiques importés et une identité propre qui se révèle dès 1868. Douze vitrines aux éclairages spécifiquement étudiés, mettent en valeur les Calices tulipes, symboles de la Hongrie, le vase paprika ou encore des pièces dites « archaïques » pour leur inspiration tirée des fouilles archéologiques du moment. Sans unité, ni fil directeur, les œuvres nous informent sur un contexte de création aussi riche dans la production industrielle que dans la production artistique.

Peut-on parler de similitudes entre la production de Zsolnay et l’Ecole de Nancy ?
François Parmentier. On peut effectivement comparer ces deux productions dans la forme mais pas dans le style. Les œuvres conçues à Zsolnay illustrent les influences autant nationales qu’internationales : le japonisme, le style ottoman, le folklore local, les découvertes archéologiques ont suscité également des pièces originales. La diversité des pièces témoigne de cette capacité à capter les influences extérieures. Si l’inspiration végétale se retrouve dans les deux écoles, Zslonay applique un décor plus éloigné du réalisme botanique de l’Ecole de Nancy. Dans le domaine des innovations techniques, citons le travail du grès, le pyrogranite ou encore le décor à l’éosine donnant à la surface un lustre métallique, véritable label de la manufacture. Par cette présentation, l’Ecole de Nancy élargit encore un peu plus son champ d’investigation tandis que le nom de Vilmos Zsolnay apparaît aux côtés d'Emile Gallé, Louis Majorelle et Antonin Daum.