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Expositions

William Etty, Canduales, King of Lydia,
Shews his Wife by Stealth to Gyges,
One of his Ministers, as She Goes
to Bed
, exposé en 1830
© Tate 2001

La reine Victoria et le nu

Les nouvelles salles Linbury de la Tate Britain ont été inaugurées hier, avec une exposition sur la représentation du nu à l’ère victorienne.

Lorsque l’on évoque l’époque victorienne, la pudibonderie est la caractéristique qui vient le plus souvent à l’esprit. Sous le règne de Victoria, la représentation du nu était en effet la cause de violentes controverses. Pourtant, on découvre avec The Victorian Nude que nombre d’artistes britanniques se sont passionnés pour le sujet. Peintures, mais aussi illustrations populaires, photographies, sculptures et films nous invitent à découvrir à travers six salles, divers aspects de la nudité : la morale, la sexualité et le désir. Une muséographie chronologique met en évidence ces thématiques. On s’étonne devant les œuvres osées des préraphaélites, comme Millais ou Burne-Jones. On est surpris par la nudité nonchalante de Tepidarium de Sir Lawrence Alma-Tadema, ou encore devant la précision dans la description anatomique d’une sculpture de Leighton.

Avec Etty, Mulready et Landseer, on voit émerger le nu en tant que sujet central dans la peinture britannique. Le chevalier errant de Millais nous donne un exemple pertinent du traitement audacieux de la chair féminine et de la controverse qu’il suscita. La seconde salle s’intéresse aux photographies des années 1860, pour lesquelles des modèles culturistes ont posé à la manière de sculptures antiques. Le corps était alors ramené à la question anatomique. La troisième salle intitulée : Le nu en privé réunit des œuvres érotiques. Dessins, peintures ou films illicites mettent en évidence la fascination des artistes pour l’érotisation de la chair. Plus loin, des études et dessins préparatoires montrent un corps fragmenté, puis reconstruit. Cette partie de l’exposition explore également le mythe de Pygmalion, la relation de l’artiste avec son modèle, et à travers ce thème, les phantasmes masculins de désir et de possession. Dans une autre salle, de spectaculaires sujets mythologiques et historiques de la fin du 19e siècle exposent des chairs martyrisées, ou flagellées, contestées lors de leur présentation dans de grandes expositions. Une section finale aborde un traitement nouveau, plus naturel, à la fin du 19e siècle. Avec le groupe New English Art Club, Sickert, Steer, ou Gwen John, le corps idéalisé, artistique disparaît. La nudité naturelle reprend ses droits et les gardera jusqu’à nos jours.




 Laure Desthieux
02.11.2001