Home > Le Quotidien des Arts > Inflation sur l’art italien

Marché

Lucio Fontana, Concetto spaziale, 1960-61, vendu chez Sotheby's le 22 octobre 2001, 443 500 £.


Giorgio Morandi, Nature morte, 1929, vendue chez Christie's le 23 octobre 2001, 355 000 £.


Inflation sur l’art italien

Les enchères londoniennes de cette semaine ont mis en vedette Fontana, Morandi et Manzoni.

Sotheby’s a tiré le premier, lundi soir, pour son «Italian Sale» annuelle. La première avait été organisée en 1999 alors que l’Angleterre accueillait de nombreuses expositions d’artistes transalpins : Lucio Fontana à la Hayward Gallery, Manzoni à la Serpentine Gallery, Boetti à Whitechapel, Pistoletto à Oxford. Pour cette troisième édition, le total de la vente s’est élevé à 6,15 millions £. L’auctioneer a fièrement mis en avant deux records mondiaux. Un sculpture de Lucio Fontana, Concetto Spaziale, a été emportée à 443 500 £ par un collectionneur américain, pour une estimation comprise entre 300 000 £ et 400 000 £, battant l’enchère établie l’an dernier, toujours chez Sotheby’s (388 000 £). Le deuxième record est le fait d’Alighiero Boetti. L’artiste, disparu en 1994 et dont un éditeur italien, surfant sur l’actualité, vient de republier le journal de voyage en Afghanistan, s’est signalé par une tapisserie vendue à 212 500 £, pour une estimation de 150 000 à 200 000 £. Aucune de ses œuvres n’avait jamais atteint ce score en vente publique. Pour Cheyenne Westphal, directrice du département art contemporain Europe, «ces résultats sont exceptionnels. On place enfin Boetti parmi les plus grands. Sa réévaluation a été favorisée par sa mort prématurée. Quant à Lucio Fontana, il attire désormais l’intérêt des collectionneurs américains, ce qui explique les valeurs atteintes par ses œuvres. S’il y avait un petit bémol à exprimer, ce serait simplement la difficulté qu’il y a à vendre des œuvres de grande dimension de l’Arte Povera, comme une installation de Paolini qui n'a pas trouvée preneur.»

Les résultats de Christie’s, mardi soir, ont confirmé la santé du secteur avec, cependant, une issue différente. Le Fontana, dont on attendait beaucoup après le précédent de Sotheby’s, un Concetto Spaziale de 1960-61, s’est vendu à son estimation basse de 160 000 £ (168 750 £ avec les commissions). Le Morandi de 1929, une belle nature morte, rare en cette période de l’artiste, a légèrement dépassé l’estimation plancher de 300 000 £ (355 000 £). Mais il faut tenir compte de la pléthore de l'offre : 10 Morandi mis sur le marché en 2 jours de ventes ! Les excellentes nouvelles sont venues de l’agitateur Piero Manzoni, dont un Achrome de 1960 a été acquis par un acheteur anonyme à 278 750 £, en bondissant au-dessus de l’estimation haute (220 000 £), après une bataille féroce entre une dizaine d'enchérisseurs. Les Marino Marini et Manzú proposés sont rentrés dans les fourchettes de prix annoncées. Sur le papier, Explosion lyrique n°15 d’Alberto Magnelli a été un franc succès, à 201 750 £ mais l’on peut penser que l’estimation, basse (90 000 £) pour une œuvre négociée 4 millions de francs il y a quelques années, ne visait qu’à une vente certaine. «Plus de 82% des lots ont été vendus, explique Olivier Camu, directeur du département art impressionniste et moderne de Christie's, contre 76% l'an dernier. Nous avons battu trois records mondiaux pour Renato Birolli, Nicola de Maria et Fausto Melotti. C'est un peu le but de ces ventes : faire connaître, derrière les têtes de file, des artistes connus en Italie mais pas encore appréciés au plan international.»


 Rafael Pic
25.10.2001