Un manteau pour drapeau

La nouvelle exposition consacrée à ce manteau magyar, le cifraszür, se déploie entre une chronologie de l’évolution paléontologique, des collections de masques africains et une barque inuit. C’est sans doute ce qui fait le charme un peu désuet et la magie du musée de l’Homme... Cette monographie réunit une quarantaine de ces somptueux habits ainsi que de nombreux documents du musée d’ethnographie de Budapest: peintures romantiques ou naturalistes et photographies d’hommes en costumes, aquarelles reprenant les motifs de leurs broderies ou objets artisanaux décorés de ce motif vestimentaire. Une manière d’illustrer l’évolution de ce vêtement « porte-drapeau » de la tradition hongroise.

L’histoire du szür est en effet bien singulière. Cette cape au col large en bure de laine, aux ourlets et aux coutures consolidées par des broderies, est apparue dès le Moyen Age. Elle servait de vêtement chaud, de protection contre la pluie, de matelas, de selle, voire de linceul aux bergers des grands centres d’élevage ovin et à toute une population modeste, de rebelles et de brigands s’étant révoltés contre leur condition de serfs. Progressivement, elle s’est répandue comme habit de fête dans le monde paysan et la petite bourgeoisie rurale. Dans le même temps, elle a adopté des formes nouvelles, s’est ornée de broderies colorées ou d’applications en feutrine plus couvrantes (fleurs stylisées, blasons hongrois, etc). Jusqu’à devenir un symbole de l’identité hongroise et de l’engagement politique dans les mouvements réformateurs. À tel point que le baron Podmanczky qui préparait les élections parlementaires de 1847 en tant que membre du parti radical de Kossuth, décida de ne pas se dévêtir de son cifraszür pendant les trois semaines de sa campagne.