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Patrimoine

Tissu aux sorcières, Vic Museu Episcopal, tissage de soie, seconde moitié du 12e siècle, 112 x 248 cm
© Abbeg Stiftung


Les sorcières ont repris des couleurs

La fondation suisse Abegg expose un exceptionnel textile médiéval dont elle vient d’achever la restauration.

Quelle est l’originalité de ce tissu ?
Regula Schorta, responsable des ateliers de restaurations.
Le Tissu aux sorcières est un tissage de soie de la seconde moitié du 12e siècle. Au 19e siècle, on a beaucoup discuté son origine - Sicile, Byzance, etc - mais aujourd’hui les motifs et les coloris ont fait admettre unanimement l’idée d’une création espagnole. Ce tissu est exceptionnel par deux aspects. Il y a d’abord le dessin, constitué de figures de sorcières hautes d’une quarantaine de centimètres et de paons affrontés. Mais il y a aussi les dimensions de la pièce. Le lé, la largeur du tissage de lisière à lisière, est de 260 cm ce qui donne des informations importantes sur les techniques textiles médiévales.

Parlez-nous de sa restauration.
Regula Schorta.
Le tissu nous a été confié par le musée Vic qui doit inaugurer ses nouveaux locaux en mars prochain. Selon les principes de la fondation Abegg, nous l’avons restauré gratuitement, dans nos ateliers, et nous en disposons momentanément pour l’exposer dans nos locaux. La restauration a duré quatre mois. Nous avons commencé avec un nettoyage par micro-aspiration. Le tissage de soie étant fixé sur plusieurs doublures (de lin, de laine ou de soie), nous n’avons pas voulu utiliser d’eau. Le risque était trop grand : cela aurait pu causer des dégâts car ces matériaux ont des réactions très différentes à l’eau. Après, nous avons repris des réparations grossières, des coutures ou des rapiéçages qui dataient de l’utilisation de la pièce comme devant d’autel à l’époque baroque. Il nous a fallu aller très prudemment, point par point, pour redonner au tissu ses dimensions d’origine et éliminer les tensions sans pour autant enlever ce qui fait l’histoire de ce tissu.


 Zoé Blumenfeld
05.11.2001