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Expositions

Visages de l'Orient extrême

La Compagnie de la Chine et des Indes révèle la beauté et la perfection d’un art à figure humaine.


Tête de Bodhisattva, stuc,
traces de poychrome,
art du Gandhara, 2e/ 4e siècle
© Compagnie de la Chine
et des Indes
À la Compagnie de la Chine et des Indes, c’est au sous-sol que tout s’expose : Bouddha, Bodhisattva ou « Fat ladies » tournent leur regard vers le visiteur. Dans la salle souterraine, semblable aux grottes ornées de figures de dévotion, le silence se fait de lui-même. Un respect certainement imposé par les nombreuses représentations religieuses qui se déclinent à l’intérieur des vitrines et dans l’espace central sous toutes leurs formes. Au premier regard, on ne discerne aucune classification stylistique ni géographique. Ces œuvres étant toutes destinées à orner des temples ou des autels de riches dignitaires, la perfection est de rigueur.



«Dans la statuaire, il n’y avait pas de place pour le médiocre.» (Mike Winter-Rousset)

La multitude des matériaux et des techniques offre au visiteur un panorama, non-exhaustif, des capacités créatrices d’Extrême-Orient. Sur la trentaine de pièces qui participent à cette présentation, aucune expression n’est semblable : force, méditation, rage ou sensibilité. Dans un angle de la pièce, une tête en stuc, celle d’un Bodhisattva du Gandhara daté du 2e au 4e siècle. Ce style gréco-bouddhique originaire d’Afghanistan est particulièrement prisé cette année. Coiffée d’un turban préformé ou mandila, la figure présente une expression de contemplation et de réflexion intérieure soulignée par la pureté des traits. À côté de cette pièce vendue 180 000 F, une vitrine rassemble des petites têtes de Bouddha en bronze du 15e et 18e siècle à 2500 F. De beaux exemples de « Fat lady », terres cuites Tang du 7e au 9e siècle qui accompagnaient les morts vers leur ultime demeure, participent à la présentation.

Dans l’angle opposé, une tête en bronze de Bouddha, dont on taira le prix, illustre ici le style Kampheng Phet de Taillande : bouclettes de dimensions strictes, nez légèrement arrondi et autres caractéristiques propres au prédicateur que l’on retrouve notamment dans le Bouddha birman du 18e siècle. Une pièce entièrement incrustée de verre coloré où l’on retrouve ce regard intériorisé sur un visage paisible, le pincement des lèvres, les oreilles allongées, les yeux mi-clos et les trois plis de beauté dans le cou sont autant de signes distinctifs du personnage. L’époque Ming (1467-1644) est représentée par cette paire de serviteurs funéraires en céramique polychrome tandis que l’époque Yuan (1271-1368) transparaît dans la tête de Bodhisattva en bronze doré rare de par sa datation et sa taille. Bien d’autres œuvres méritent une attention particulière comme ce génie de la terre à visage humain qui ornait l’entrée des sépultures (320 000F). Avant de sortir, un dernier regard sur Cakreshvari, une pièce indienne du 9e siècle, dans laquelle l’oiseau mythologique Garuda prend un visage humain.


 Stéphanie Magalhaes
21.11.2001