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Expositions

Pierre Huang La,
20cm x 18cm x 31cm
© Galerie Luohan

Le monde dans un caillou

La galerie Luohan nous invite à découvrir les secrets des pierres de lettrés.


Pierre de Lingbi,
9,5cm x 8,5cm x 16cm
© Galerie Luohan
Réservées à une certaine élite de la société chinoise, ces pierres, dites de lettrés, apportaient à qui les contemplait évasion, calme et sérénité. Deux types de pierres se distinguent : la pierre de Ying, provenant de falaises et donc plus incisive, la pierre de Lingbi, tirée de la terre glaise et laissant un aspect massif et léger. Datés de plusieurs millions d’années, ces minéraux sont montés sur des socles de différentes hauteurs selon les goûts du propriétaire. Ainsi présentées, elles invitent l’observateur à se perdre dans leurs cavités et à suivre les veinures de la matière. Passer du chaos de la pierre brute à l’apparition de formes plus ou moins réalistes : la patience est de mise pour apercevoir ici un chien, là une grenouille et plus loin un dragon. L’évasion mystique laisse ensuite place à l’illumination esthétique. La taille de la pierre n’influe pas sur sa force.


Pierre de Lingbi,
72cm x 40cm x 110cm
© Galerie Luohan
À son origine, une petite pièce était synonyme de puissance car elle concentrait en elle toute l’énergie des montagnes. De la grandeur des pierres dépend la richesse des détails. Si l’intervention humaine n’était pas interdite, pour le polissage par exemple, elle était rare et servait essentiellement à révéler d’éventuelles visions. Les 20 pierres exposées à la galerie Luohan cristallisent les croyances ancestrales de la civilisation et de la pensée chinoises. Les titres donnés, comme Dragon couché admirant les nuages, révèlent la poésie et le pouvoir évocateur de ces œuvres naturelles. Le développement de l’abstraction en Europe, dans les années 60, a introduit un nouveau goût pour les pierres de lettrés. Celles-ci apparaissaient dès lors sur le marché occidental. Entre 3000 et 220 000 FF, ces pièces rares et recherchées représentent l’essence même de la création. Ne peut-on pas voir dans les peintures monumentales de paysages une inspiration minérale issue de l'observation longue et fructueuse de ces témoins archaïques?


 Stéphanie Magalhaes
22.11.2001