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Expositions

Horloge de Pierre de Fobis, 1532
The Frick Collection, New York
Legs de Winthrop Kelly Edey, 1999
© Photo : Richard di Liberto

L’art du temps

Le legs par un riche collectionneur américain de 25 horloges et 14 montres fait l’objet d’une exposition à la Frick Collection de New York.

Winthrop Kellogg Edey (1937-1999) a commencé sa collection à l’âge de douze ans ! Issu d’une famille riche, son héritage lui a permis de vivre de ses rentes dès la fin de ses études. Menant une vie de fastes à New York, il a parallèlement cherché à développer son bien et ses connaissances en horlogerie. Il est bientôt devenu un spécialiste de la question. Son expertise en la matière lui a valu de travailler comme consultant pour Christie’s, New York, le Getty Museum à Los Angeles ainsi que pour le Time Museum de Rockford dans l’Illinois.


Horloge en forme de tambour,
1550, signée “M”, probablement
Augsburg
The Frick Collection, New York
Legs de Winthrop Kelly Edey,
1999 © Richard di Liberto
Outre des objets de très grande valeur, la collection comprend une bibliothèque sur l’histoire de la mesure du temps. Ces pièces illustrent le développement technique et stylistique de cet art, de 1500 à 1830. Le goût de Winthrop Edey pour la décoration l’a amené à se concentrer tout particulièrement sur l’horlogerie française. Les visiteurs de la Frick Collection peuvent découvrir 13 horloges et 8 montres. Parmi les pièces les plus rares, on trouve une pendule de table de Pierre de Fobis (1506-1575) de style gothique, réalisée au début des années 1530. On peut admirer une petite horloge portable allemande en forme de tambour, datant d’avant 1550. Trois beaux exemples de marqueteries élaborées par André-Charles Boulle (1642-1732) sont également présentés.


Horloge avec baromètre, 1690-
1700. Mouvement d'Isaac Thuret,
caisse : André-Charles Boulle
The Frick Collection, New York
Legs de Winthrop Kelly Edey,
1999 © Richard di Liberto
Est-ce que l’on sait comment Winthrop Edey s’est pris de passion pour l’horlogerie ?
Samuel Sachs II. Directeur de la Frick Collection. A l’âge de neuf ans il a reçu une montre en cadeau. Comme beaucoup de petits garçons l’auraient fait, il l’a démontée, mais ce qui est particulier, c’est qu’il l’a entièrement remontée tout seul. Cela est devenu un véritable passe-temps. Peu à peu on lui a apporté des montres anciennes ou rares à réparer, ce qu’il faisait remarquablement. C’est ainsi que cette passion a commencé.

Pourquoi a-t-il légué sa collection à la Frick et pourquoi la Frick l’a-t-elle acceptée ?
Samuel Sachs II. Tout d’abord, il adorait la Frick Collection. Mais surtout, il trouvait que c’était la taille idéale, un musée ni trop grand, ni trop petit. Il appréciait le calme du lieu, et trouvait ses visiteurs fort respectueux. Le musée, de son côté, était intéressé parce que Henry Clay Frick lui-même avait acquis une collection importante d’horloges. Cela nous permettait donc, d’une part de compléter notre fonds, d’autre part d’attirer l’attention du public sur cet art méconnu, qui fait pourtant partie intégrante de la Frick Collection.

Quelles œuvres retenez-vous particulièrement parmi celles qui sont présentées dans l'exposition ?
Samuel Sachs II. Il y en a une qui fascine tout le monde, c’est une horloge de Abraham-Louis Breguet, que Winthrop Edey considérait comme un génie. Cette pendule a été conçue sous la Révolution française. Durant cette période, vous le savez, il était décrété que l’on devait tout changer, les mois, mais aussi la manière de mesurer le temps. Un système décimal fort compliqué à représenter sur un cadran a été adopté. Breguet a créé une horloge avec un cadran révolutionnaire. C’est un objet d’une grande beauté orné d’or et d’émaux et quand on le retourne, on trouve un cadran régulier !


 Laure Desthieux
19.11.2001