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Marché

Paul Dupré-Lafon, Bar d'appartement
Estimé : 2,5 / 3 millions FF, vendu : 3,7 millions FF

Le phénomène Dupré Lafon

Felix Marcilhac et Jean-Marcel Camard commentent le succès de la vente Tajan d'arts décoratifs du 20e siècle.

Depuis plusieurs années, dans le mouvement de redécouverte des années 40, l’engouement pour Paul Dupré-Lafon se développe, provoquant une envolée du marché. Ce mobilier séduit à la fois par le luxe de ses matériaux mais aussi par sa modernité et son caractère viable. Ces pièces s’intègrent aisément dans un intérieur contemporain et le raffinement de leurs détails n’empêche pas de s’attabler à un bureau ou à une table basse du designer… Un détail somme toute important qui explique que les meubles plus passéistes et plus fragiles de Ruhlmann n’atteindront jamais des enchères aussi élevées.

La vente de l’étude Tajan du 20 novembre a confirmé cette tendance. Elle a totalisé 37 millions FF frais inclus, soit plus que Christie’s et Sotheby’s réunis lors de leurs dernières enchères de la specialité, se plait à souligner Félix Marcilhac, expert de la vente. À l’intérieur de ces résultats très satisfaisants, les 28 lots de Dupré-Lafon ont connu un réel succès. 80% d’entre eux ont trouvé acquéreur et 9 d’entre eux avec des enchères millionnaires. Parmi les plus belles, on note un grand bar d’appartement en chêne sablé gainé de cuir rouge (3,7 millions FF) ou une table basse carré au plateau en bois de bout, emportée 2,9 millions FF malgré les quatre mois de travaux d’ébénisterie rendus nécessaires par le léger décollement des lames de bois.

Ce succès semble d’autant plus satisfaisant que l’expert souligne «l’attentisme des galeries parisiennes». «Mardi, on a vraiment pu constater un essoufflement du négoce parisien pour cette marchandise. En mai dernier, les marchands animaient la vente. Dans le contexte actuel, leur contrepartie était assez faible et la plupart des enchérisseurs étaient des collectionneurs privés ou des galeristes étrangers». La sérénité est également de mise à l’étude Camard à l’approche de la grande vente des 4 et 5 décembre qui proposera 8 lots de Dupré-Lafon dont deux tables basses aux plateaux gainés de parchemin et une rare paire de fauteuils en cuir havane dont les larges accoudoirs plats masquent de profonds coffres plaqués de sycomore. «C’étaient de très belles enchères qui ont prouvé que le marché reste disputé pour des œuvres d’exception. Lorsque les prétentions étaient trop importantes, les lots ont été ravalés et c’est un point positif, explique Jean-Marcel Camard. C’est le signe d’un marché sain et propre où les choses se paient à leur juste valeur. On n’est plus dans le cas d’une spéculation où l’on veut faire prendre des vessies pour des lanternes».


 Zoé Blumenfeld
24.11.2001